STORY

OVERKILL (thrash metal), Scorched (14/04/2023)

Le 01/07/2023

Overkill n'a rien perdu de sa hargne, le vétéran alterne le heavy, le speed et le  thrash metal en multipliant les déflagrations.

Par Ahasverus

OVERKILL 1.- La Story :

Overkill est originaire du New Jersey. Le premier qui dit « Comme Bon Jovi » se verra privé de newsletter Ahasverus pendant trois mois !
En 1980, Rat Skates et DD Verni, issus de la scène punk, sont désireux de monter un nouveau groupe. Ils passent une annonce pour trouver un guitariste et un chanteur. C'est ainsi qu'ils font la connaissance de Bobby Ellsworth, vocaliste au timbre haut et hargneux, dont le registre peut rappeler Rob Halford (Judas Priest) et Udo Dirkschneider (Accept).
Après avoir évolué un temps sous le nom de Virgin Killer, la nouvelle formation décide de s'appeler Overkill. Outre l'idée de puissance qu'il dégage, ce nom est un clin d'oeil au standard de la bande à Kilmister sorti un an plus tôt. Bobby Ellsworth explique d'ailleurs à Metal Overload : « Nous étions un groupe de covers quand nous avons commencé et Motörhead était dans notre set. Une des plus grandes raisons pour lesquelles nous avons choisi ce nom est parce que nous avons été reconnu via la chanson Overkill que nous avions jouée. »
Outre Motörhead, Overkill se fait les dents sur des reprises de la scène punk, mais aussi sur des morceaux de Judas Priest ou Riot avant de commencer à créer ses propres compositions. Une première démo diffusée à 1500 exemplaires (« The Power In Black ») sort en 1983 et permet au groupe de figurer sur la compilation Metal Massacre II aux côtés d'un autre débutant appelé lui aussi à devenir célèbre : Armored Saint. 
Overkill sort un EP éponyme de quatre titres dans la foulée, mais il faut attendre 1985 pour voir arriver « Feel The Fire », son premier album, avec au chant Bobby Ellsworth, à la guitare Bobby Gustafson, à la basse D. D. Verni et à la batterie Rat Skates. 
Overkill feel the fire
Si certains de ses titres sonnent heavy dans la veine d'un Judas Priest (« Raise The Dead »), d'autres compositions du calibre de « Rotten To The Core » ou « Second Son », font la différence et restent à ce jour des références remarquables du thrash metal.
L'album, qui rappelle les origines du groupe en affichant une cover du combo punk The Dead Boys, donne à Overkill l'opportunité de rejoindre la tournée américaine de Megadeth pour le « Peace Sells Tour », puis de tourner en Europe avec Anthrax.
Plutôt fidèle à son prédécesseur, « Taking Over », second long format d'Overkill, est livré en 1987 sur le label Atlantic Records. C'est cette fois en première partie du groupe Helloween que les Américains fouleront les scènes européennes. Ce « Keeper Of Th Seven Keys 1 Tour » passera par Paris, Besançon et Douai !
Overkill helloween
Un EP intitulé « !!!Fuck You!!! », avec une cover du groupe punk britannique Subhumans et des titres live, sort la même année.
« Under The Influence » (1988), troisième album des Américains, marque le départ du batteur/fondateur Rat Stakes, qui confie ses baguettes à Sid Falck. Il propose une introduction fracassante et presque bruitiste, des structures quasi avant-gardistes (« Ma Gone World ») mais l'album trouve rapidement son rythme. Il permet au groupe de lârguer une petite bombe heavy sur MTV : « Hello From the Gutter », troisième piste de l'album.

Le quatrième album, « The Years Of Decay », arrive un an plus tard. Un opus aux structures complexes, avec des morceaux volontiers supérieurs à huit minutes. Overkill place le titre « Elimination » sur MTV. Ce morceau monstrueux agrémentera régulièrement les setlists des concerts. 

« Horrorscope », cinquième album des thashers américains, arrive en 1991. Bobby Gustafson quitte son poste. Overkill recrute deux guitaristes pour le remplacer : Merritt Gant (du groupe de thrash  Faith or Fear) et Rob Cannavino (un technicien guitare de Gustafson). Durant la tournée suivante, c'est au tour du batteur Sid Falck de quitter le groupe.  Tim Mallare, qui jouera sur le prochain opus, prend sa place. A ce jour, « Horrorscope » reste un très bon album de thrash.


« Horrorscope » comprend une reprise de « Frankenstein » en sixième piste. Sortie en 1973, cette pièce instrumentale est issue du répertoire du Edgar Winter Group. Edgar est le frère de Johnny Winter, le fameux guitariste albinos, avec lequel il a d'ailleurs joué. « Frankenstein » figure d'ailleurs en avant-dernière piste du « Live at Royal Albert Hall » de Johnny Winter.


En 1993 sort « I Hear Black ». Ce sixième album voit Overkill s'éloigner du thrash pour une musique stoner/doom faite de riffs plutôt sombres (le lancinant instrumental « Ghost Dance »). Bobby Ellsworth le reconnaissait à Radio Metal : « Ce qui s’est passé, au final, à ce moment précis est que j’écrivais mes parties avec trois compositeurs différents. Ces gars étaient plus jeunes et apportaient des morceaux plus modernes, inspirés par la côte ouest, surtout le nord-ouest des Etats-Unis et Seattle, ils étaient à fond dans Alice In Chains, les premiers Soundgarden, Temple Of The Dog, etc. Ecoute, certains de ces trucs sont super – ne te méprends pas – mais j’étais un thrasheur, je n’avais rien à foutre sur leur terrain de jeu. » 
Un an plus tard, le septième album marque la reprise en main de la direction musicale par la paire Verni/Ellsworth qui remet le cap au thrash avec l'album  : « W. F. O. ».


.L'instrumental « R. I. P. (Undone) », présent sur l'album « W. F. O. », est un tribute instrumental à Criss Oliva, guitariste de Savatage, décédé quelques mois avant la sortie de l'album.


Les guitaristes Rob Cannavino et Merrit Gant quittent Overkill. Ils sont remplacés sur « The Killing Kind »  (1996), huitième album de la formation, par Sebastian Marino, co-fondateur d'Anvil, et par Joe Comeau, qui rejoindra Annihilator dans les années 2000. L'opus fait la part belle au heavy/thrash sans toutefois renoncer totalement au doom (« Burn You Down - To Ashes », « The Cleansing »). Il aborde des horizons qui peuvent surprendre les fans (« The Morning After / Private Bleeding »).

A la fin de l'année 1996, Overkill réunit les EP  « Overkill » (1985) et « !!!Fuck You!!! », agrémentés de quelques live et d'une cover de Black Sabbath, sur un douze pistes intitulé « !!!Fuck You!!! and Then Some ».
Il sort l'année suivante, 1997, son neuvième album : « From the Underground and Below ». Le heavy qu'il contient est très éloigné des débuts (la ballade « Promises »), même si des morceaux comme « F. U. C. T. » ou « Little Bit O' Murder » tentent de donner le change.
« Necroshine » voit Overkill inviter Mary Ellsworth, la soeur de Bobby, à chanter sur deux morceaux. Une cover des Sex Pistols (« No Feelings ») agrémente l'édition japonaise de l'album. Elle sera reprise sur l'album suivant.
Sebastian Marino (guitare) est remplacé par Dave Linsk (Anger On Anger). Avec ce nouveau line-up, toujours en 1999, Overkill signe « Coverkill », qui regroupe douze reprises allant de Jethro Tull à Dead Boys, en passant par Manowar et Kiss.
Toujours très prolifique, Overkill revient dès 2000 avec son onzième album, « Bloodletting ». Malgré quelques arpèges, il marque un retour au thrash metal furieusement agressif. (« My Name Is Pain ») Comeau ayant quitté le groupe, c'est un quatuor qui signe cet opus. « Bloodletting » est suivi par l'album live « Wrecking Everything » en 2002. Le guitariste  Derek Tailer vient renforcer le groupe à la guitare rythmique. Il sera désormais présent sur les albums studio.


Comme Iron Maiden a Eddie, Overkill a sa mascotte. Elle se nomme Chaly, et c'est une chauve-souris à tête de mort, avec  des cornes, et capable de faire sortir des rayons laser de ses yeux. 
La mascotte surgit pour la première fois en 1988, sur l'album « Under The Influence ». Elle reviendra régulièrement sur les artworks, mise en situation. Les cornes en moins, le groupe Avenged Sevenfold utilise une mascotte à l'apparence très proche de Chaly : Deathbat.

Overkill under influence chaly


« Killbox 13 » (2003) et « ReliXIV » (2005) maintiennent la recette heavy thrash d'Overkill, de même qu' « Immortalis » (2007), fidèle au thrash metal nerveux, cependant que le batteur Tim Mallare laisse sa place à Ron Lipnicki et que Ranndy Blythe (Lamb Of God) est sollicité pour un featuring sur le morceau « Skull And Bones ».
« Ironbound » (2010) est suivi par le très dynamique « The Electric Age », percutant et efficace tout au long de ses cinquante minutes. « White Devil Armory » (2014) a la lourde charge de lui succéder. Il s'en sort plus qu'honorablement puisqu'il sera l'album le mieux classé de la carrière du groupe.
Overkill white devil
Après avoir fait patienter les fans avec le coffret « Historikill: 1995–2007 », Overkill revient en 2017 avec « The Griding Wheel ». Bobby Ellsworth expliquait à HARD FORCE : « Ce qui me plait vraiment sur The Grinding Wheel  est qu’il est d’une grande diversité. Il y a de la New Wave of British Heavy Metal, du metal classique, de l’énergie thrash, du rock 'n' roll, du groove, du punk… » 
Après cet opus, le batteur Ron Lipnicki quitte le groupe, cédant sa place à Jason Bittner (Shadow Falls) pour l'album « The Wings Of War » (2019), qui sait se faire complexe (« Heads Of A Pin »).

La pandémie qui frappe la planète repoussera à 2023 la sortie de l'album suivant.

OVERKILL 2.- Le nouvel album : « Scorched »

Le fait de sortir en même temps que « 72 Seasons » de Metallica aura peut-être éclipsé à vos yeux le nouvel Overkill ? Il est grand temps de vous rattraper ! Et « Scorched », qui donne son titre à l'album, est une p*** d'entrée en matière qui va remettre vos pendules à l'heure ! 

Pour l'artwork, Overkill retrouve Travis Smith qui signait déjà « The Wings Of War ». Bobby Ellsworth expliquait à Radio Metal :  « Nous avons suggéré à Travis Smith l’idée de l’ouroboros, le serpent circulaire qui mange sa propre queue, je crois que ça vient de la mythologie grecque. Il a commencé à utiliser notre chauve-souris à la place du serpent et ça a continuellement évolué. »
Overkill
Bobby Ellsworth éructe comme un démon. Il enchaîne sur un morceau de speed metal à la Accept («Goin' Home ») et ne faiblit pas en suivant (« The Surgeon »). « Wicked Place » est groovy et peut rappeler sur le pont un Black Sabbath en mode thrash. 

« Won't Be Comin Back » rappelle Judas Priest. « Know Her Name » tire plus vers le timbre porcin de Dirkschneider. « Harder They Fall » met le pied au plancher avec des rythmiques d'une rapidité extrême. « Bag o' Bones » fait cingler les cordes et clôt l'album en mode groovy.
Fidèle à lui-même, Overkill alterne le heavy, le speed et le  thrash metal en multipliant les déflagrations. L'inusable formation américaine n'a rien perdu de sa hargne ni de sa puissance. Elle garde sous le pied largement de quoi vous faire headbanguer et réussit à nouveau un excellent album heavy-thrash qui ne vous posera pas question.  Plongez dans cette galette sans hésiter et sans risque d'hydrocution : elle est à la hauteur de la carrière de cet énorme groupe.

SIRENIA (métal symphonique), 1977 (26/05/2023)

Le 27/06/2023

Sirenia a inscrit l'évolution dans son ADN, une évolution facilitée par le chant protéiforme d'Emmanuelle Zoldan, par l'inspiration sans fin de Morten Veland, par l'écrin d'arabesques que le virtuose Nils Courbaron est capable de tisser avec sa guitare et par la puissance et la rapidité du jeu toujours fluide de Michael Brush.

Sirenia 1977 cover
Par Ahasverus


SIRENIA - 1.- La Story :

Morten Veland est un musicien norvégien. Il est, à la fin des années 90, l'un des fondateurs du groupe Tristania, qu'il quitte en 2000, après trois albums et de sérieuses divergences musicales.
Il monte alors Sirenia, projet dont il sera seul maître, compositeur principal, mais aussi chanteur multi-instrumentiste.  
Pour son premier album, « At Sixes And Sevens », Sirenia s'appuie sur le guitariste/chanteur Kristian Gundersen (Elusive), la chanteuse Fabienne Gondamin, et sur des membres de Tristania (le guitariste Jan Kenneth Barkved et le violoniste Pete Johansen). Volontiers agressif, « At Sixes And Sevens » empruntera à l'univers black et gothique façon Cradle of Filth. Le growl, le chant lyrique et les choeurs (quatre choristes) se côtoient, avec des phases opératiques à la Thérion. L'album est produit au Sound Suite Studio de Marseille, pour un rendu un poil trop rustique pour sa catégorie. Il sort cependant chez le géant autrichien Napalm Records, auquel Veland est alors lié pour deux albums.
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La géométrie variable autour du fondateur s'affiche dès « An Elixir For Existence », ce qui n'empêche pas ce nouvel album de rester dans la même veine que son prédécesseur.  La Française Fabienne Gondamin, étant incapable d'honorer la tournée « At Sixes And Sevens » Veland est contraint de la remplacer sans délai par la Norvégienne Henriette Bordvik. Du reste du line-up, il ne garde que le guitariste Kristian Gundersen, confiant la batterie Jonathan Perez (Trails of Tears) et invitant Anne Verdot et son violon. Morten Veland assure lui-même la majorité des parties instrumentales qu'il agrémente de cinq choristes. Deux mois plus tard, Sirenia propose l'EP cinq titres « Sirenian Shores », qui alterne des inédits, un remix et un acoustique revisitant son répertoire, ainsi qu'une reprise de la chanson de Leonard Cohen « First We Take Manhattan ».
Dégagé de ses obligations envers Napalm Records, Sirenia rejoint le label allemand Nuclear Blast pour un troisième album, « Nine Destinies and a Downfall » (2007). Le line-up est totalement renouvelé autour de Morten Veland, les musiciens ayant préféré se recentrer sur leurs différents projets. Morten recrute la chanteuse danoise Monika Pedersen (Sinfonia). Celle-ci fait une proposition moins lyrique que ses prédécesseurs et ouvre ainsi une nouvelle voie pour Sirenia : le chant féminin prend le lead pour la première fois, toujours supporté par des choeurs très étoffés. Le son de l'album est cette fois travaillé dans différents studios, le Marseillais Sound Suite, toujours, mais également deux studios norvégiens. L'Américain Anthony Clarkson (Queensryche, In This Moment) réalise l'artwork de cet opus moins stéréotypé qui se détache des débuts discographiques par sa variété.
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En suivant, « Nine Destinies and a Downfall » est bien accueilli, ce qui n'empêche pas la malédiction du line-up de se répéter : Monika Pedersen ne se retrouve pas dans l'univers de Sirenia.  Elle annonce sa décision de voguer vers d'autre projets. L'Espagnole Pilar Gimenez Garcia, alias Ailyn, qui s'est illustrée dans la version espagnole de The X Factor, lui succède pour l'album « The 13th Floor » (2009). Morten assure à nouveau la majeure partie des instruments présents sur l'album, tandis que le violon est tenu par la française Stephanie Valentine. « The 13th Floor » suit la voie de « Nine Destinies and a Downfall » sans retrouver le même brio.


En 2010, Morten Veland ouvre Mortemia, un projet parallèle sous lequel sort l'album « Misere Mortem » , avec notamment Emmanuelle Zoldan aux choeurs. Il propose ensuite les EP « The Pandemic Pandemonium Sessions » et « The Covid Aftermath Sessions », prétextes à collaborer avec différentes chanteuses du monde du metal, telles que Melissa Bonny (Ad Infinitum), Liv Kristine (Leaves' Eyes), , Ambre Vourvahis (Xandria) ou ou encore Heidi Parviainen (Amberian Dawn), que Veland retrouvera au Rock N'Eat de Lyon le 14/09/2023 puisqu'Amberian Dawn (Suède), Dark Sarah (Finlande) et Rexoria (Suède) accompagnent Sirenia sur le Symphonic Metal Nights Tour. C''est la seule date française que nous avons recensée sur cette tournée européenne.
Mortemia mettait en ligne voici deux semaines le clip « Antidote », avec Fabienne Emi, la chanteuse de la formation suisse Eluveitie.


Le cinquième album de Sirenia, « The Enigma Of Life » (2011), voit pour la première fois une chanteuse (Ailyn) opérer sur deux albums consécutifs. Un titre est même proposé en langue espagnole ! De ses débuts, Sirenia conserve les choeurs à la Therion, tandis que la prédominance de la voix féminine dans le leadership vocal est désormais acquise et que les éléments black/death des deux premiers albums font partie du passé. Malgré tout, « The Enigma Of Life » nous semble marquer le pas.
En 2013 Sirenia signe « Perils of the Deep Blue ». Cette fois le groupe offre un titre en langue norvégienne. Veland a décidé de briser la routine des derniers albums, il ose une composition de plus de douze minutes. Le ton d'ensemble est plus explosif, le son du Norvégien Endre Kirkesola (mixage et mastering) est puissant, et les choeurs et les riffs plus présents. Sirenia entre pour la première fois dans les charts américains. Le morceau d'ouverture de l'album, « Ducere Me In Lucem », apparaît même sur la bande originale du film d'épouvante « Abandoned Dead ».
Sirenia abandoned death
Le septième opus du groupe, « The Seventh Life Path » (2015), marque le retour de Sirenia dans l'écurie Napalm Records. Ailyn détient désormais le record de longévité en tant que vocaliste, avec quatre albums consécutifs. A son habitude, Morten Veland prend tous les instruments à son compte. Joakim Naess intervient en voix claire masculine sur le titre « Elixir » tandis qu'un choeur à cinq voix donne une épaisseur symphonique aux morceaux.
2016 Patatras ! De choriste, Emmanuelle Zoldan passe frontwoman pour l'album « Dim Days of Dolor », tandis qu'Ailyn est invitée à se diriger vers la sortie. Zoldan n'est pas une inconnue pour Sirenia. La Française a pris pension dans les choeurs du groupe de longue date, et elle assurait déjà  le chant lead sur la cover de Leonard Cohen de l'EP « Sirenian Shores ». En plus de son chant lyrique, Emmanuelle Zoldan possède une voix claire très polyvalente, qui n'est pas sans rappeler parfois celle de Madonna, et son apport au nouveau son de Sirenia est significatif.
« Arcane Astral Aeons » arrive en 2019. Pour la première fois Sirenia fait appel au crowdfunding. Son titre d'ouverture est une alternance de chant lyrique, cette fois-ci omniprésent, et saturé, dans un rendu qui n'est pas sans rappeler le travail de Turunen et Hietala dans Nightwish. Le talent lyrique d'Emmanuelle Zoldan, qui signe deux morceaux en Français, éclate. Contrairement aux albums précédents, Morten Veland a laissé de la place aux guitaristes Niels Courbaron et Jan Erik Soltvedt qui agrémentent l'album de leur soli. Jacob Hansen (U.D.O., Epica) assure le mixage d'un album de métal symphonique teinté de pop (« Nos Heures Sombres »), aux qualités de songwriting évidentes et au casting de plus en plus affiné.

Produit en totalité par Morten Veland, « Riddles, Ruins & Revelations »  (2020) est le dixième album du groupe. Il se veut « moderne et nouveau », et il se fait heavy et dissonant tout en restant mélodique, intégrant des éléments presque dance (« Towards And Early Grave», « Into Infinity »), enfonçant le clou de la synthpop avec une reprise du tube de Desireless « Voyage, Voyage » (une idée de Morten) assez fidèle à l'originale malgré sa dimension métallisée. Les soli des guitares virevoltent, Emmanuelle Zoldan use aussi bien de sa voix claire que de son chant lyrique. Le batteur britannique Michael Brush (Magic Kingdom) complète une formation qui semble avoir trouvé sa nouvelle formule idéale.


SIRENIA - 2.- Le nouvel album : « 1977 »

Nous en arrivons naturellement à 2023, avec « 1977 », sorti chez Napalm Records le .26/05/2023.
Comme ne le laisse pas supposer la macabre pochette de ce onzième album, 1977 est l'année de naissance de Morten Veland.
Veland/Zoldan/Courbaron/Brush restent la base d'une formation désormais française pour moitié.


Sirenia cecile delpoio
Sirenia par Cecile Delopio, qui
 a signé les photographies du groupe visibles dans le livret du nouvel album. Cette touche-à-tout de type couteau suisse a également dirigé le clip « Deadlight ». Outre ses talents visuels, Cécile est une magnifique voix lyrique. Elle est la chanteuse du groupe de métal symphonique Remember The Light et elle a sorti en 2022 son premier album solo, intitulé « Tuolla », sur lequel Nils Courbaron fait un featuring. 


Pour la première fois dans l'histoire de Sirenia, l'album a été mixé et masterisé au Vamacara Studio. L'ambiance est à la pop. « Nous voulons que chaque album ait son propre son, sa propre identité, en essayant d’apporter quelque chose de frais à chaque fois », confie Veland à Long Live Metal. Sirenia a en effet inscrit l'évolution dans son ADN, une évolution facilitée par l'inspiration sans fin du barreur Morten Veland, par l'écrin d'arabesques que Nils Courbaron tisse mieux que quiconque à la guitare, par la puissance et la rapidité du jeu toujours fluide de Michael Brush, enfin par le chant protéiforme, aussi remarquable en voix claire qu'en lyrique, d'Emmanuelle Zoldan, parfois soutenue par une belle voix masculine (« Fading To The Deepest Black »).

Cette complémentarité de talents au sein de la plus française des formations norvégiennes aboutit à une alchimie qui permet à un album très technique de paraître volontairement abordable. Opus de métal symphonique avant tout, il lorgne en toute conscience vers l'insouciance de la new wave qui marquait les années 80 (les claviers de « The Setting Darkness » peuvent rappeler le son d'Alphaville). Ceci ne devrait pas déstabiliser la vieille garde des fans de Sirenia, habituée aux envies d'exploration du pacha. Fédérateur, « 1977 » pourrait plutôt rallier un nouveau public attiré par sa musicalité et sa grande polyvalence. Cet écart n'empêchera pas non plus Sirenia de continuer à s'imposer parmi les grands du genre sympho, en leader plutôt qu'en suiveur. C'est qu'à l'instant « T » il bénéficie d'un line-up qu'on voudrait pérenniser tant la formule est homogène, tant ces musiciens sont ceux qui conviennent pour relever les challenges de leur leader, et tant le son de Sirenia,  quelle que soit l'ouverture musicale, devient reconnaissable, notamment par le style de son guitariste virtuose.
« 1977 » est un album qui s'attaque au champ des possibles et qu'on recommande bien au-delà du cercle des amateurs de métal symphonique. 
Morten Veland a choisi à nouveau de conclure « 1977 » par une cover, jetant cette fois son dévolu sur le tube « Twist In My Sobriety » signé par Tanita Tikaram en 1988.

WINGER (hard mélodique), Seven (05/05/2023)

Le 25/06/2023

Nous n'hésiterons pas à placer « Seven » parmi les grandes sorties hard mélodique de l'année. Les amateurs le ponceront jusqu'à l'usure.

Par Ahasverus

WINGER 1.- La Story :
Winger naît  à New York dans la seconde moitié des années 80. Il est formé par des musiciens déjà très expérimentés : Kip Winger (chant/basse) et Paul Taylor (clavier) sortent des rangs du Alice Cooper Band (période « Constrictor » / « Raise Your Fist And Yell ») ; Red Beach (guitare) a joué pour les Bee Gees et Twisted Sister (« Love Is For Sucker ») ; Rod Morgenstein (batterie) a fait partie du groupe de rock  progressif  Dixie Dregs durant plusieurs années.
Le quatuor sort un premier album éponyme en 1988. Il est produit par Beau Hill (Alice Cooper, Ratt). Winger se fend d'une reprise du « Purple Haze » de Hendrix sur lequel le guitariste Dweezil Zappa pose un solo. L'album est porté par des morceaux tels que « Seventeen » et « Madalaine » . Son style est très proche de Warrant, et dans une moindre mesure de Skid Row ou Mr Big. Le son et le look sont caractéristiques de la période Hair Metal. L'opus connaît un succès immédiat. 

 En 1990 le même line-up bat le fer tant qu'il est chaud. Beau Hill reste aux manettes. Ce second opus reste dans la trace de son prédécesseur, sans parvenir toutefois à se faire aussi accrocheur malgré qu'il soit plus moderne et plus original. Un trombone et une trompette font leur apparition sur le morceau « Rainbow In The Rose ».
« Pull » (1993), l'album suivant, est l'oeuvre d'un trio guitare/basse/batterie. Paul Taylor a quitté la formation. Mais la vague grunge a provoqué un raz-de-marée qui sera fatal à de nombreux groupes de heavy 80's. Dans le clip officiel de Metallica « Nothing Else Matter », l'inélégant Lars Ulrich joue aux fléchettes sur un poster de Kip Winger (02:56) et la formation new-yorkaise devient l'un des souffre-douleurs de la série d'animation Beavis et Butt-Head. Winger passe dans le camp des has-been. Mis en valeur par la production de Mike Shipley (Def Leppard, Scorpions), le chant de Kip est pourtant à son meilleur et les compositions signées Kip Winger/Reb Beach sonnent modernes et percutantes, à l'instar de l'excellent « Down Incognito ».

Victime du désamour, Winger se sépare. Pour mieux se retrouver ? Une première fois en 2001 pour un best-of. Mais la véritable reformation Winger/Beach/Morgenstein intervient en 2006 avec « IV », un album aussi sombre que sa pochette signée Ethan Van Sciver, dessinateur de comics (Flash, New X-Men).
Winger iv
A cette occasion, le guitariste John Roth (qui avait rejoint la tournée Winger de 1990 et qu'on voit sur la vidéo de « Down Incognito ») ainsi que Cenk Eroglu (clavier) complètent le line-up. Kip Winger assure la production.
Il faut attendre 2009 et « Karma » pour retrouver le même line-up avec un son plus heavy et un album aux premières pistes très rentre-dedans. Winger reprend du poil de la bête avec des compositions plus saignantes et séduisantes que sur le précédent opus.
« Better Days Comin' » (2014), le sixième album, se démarque avec une approche originale et mélodique et ne laisse aucun doute sur le fait que Winger est de retour aux affaires avec des titres chaleureux, groovy (« Better Days Comin' ») et catchy, qui savent se montrer aussi agressifs (« Rat race ») que progressifs (« Tin Soldier »).

WINGER 2.- Le nouvel album :
Il faudra pourtant attendre neuf ans avant la sortie d'un septième album. C'est chose faite le 05/05/2023. Il s'intitule sobrement : 

« SEVEN »

Winger seven
Pour l'occasion, Paul Taylor ramène son clavier, et le groupe fait appel à Ted « Hotel California » Jensen pour le mastering.
Pour amorcer, Winger sollicite le hit maker (« I Was Made For Lovin' You » de Kiss, « Livin' On A Prayer » de Bon Jovi, « Poison » d'Alice Cooper, et même « Livin' La Vida Loca » de Ricky Martin !) Desmond Child, qui n'a rien perdu de son sens mélodique et qui signe avec Kip la piste d'ouverture : « Proud Desperado ».

Ceci posé, la suite des compositions est essentiellement le fait de la paire Winger/Beach.
Elle sait se montrer à la hauteur (« Resurrect Me ») et enchaîner des morceaux qui mettent en évidence le groove dans la voix de Kip (« Voodoo Fire »).
La réussite dans le genre est totale, Winger construit un album de hard mélodique qui met le feu de bout en bout. Sexy en diable, il vous déboite la hanche avant de vous entraîner dans des power ballades à faire baver les crooners (« Broken Glass »), à la manière d'un Ronnie Atkins, tandis que la guitare retrouve la talk-box chère aux 80's (« It's Okay » et son refrain mélodique à tomber par terre), ou se fend de riffs bien heavy (« Stick The Kife In And Twist ») sans se départir d'une musicalité présente tout au long de l'album.
Kip Kip Hooray ! Nous n'hésiterons pas à placer « Seven » parmi les grandes sorties hard mélodique de l'année. C'est incontestablement un album de choix dans la discographie de Winger. Les amateurs le ponceront jusqu'à l'usure.

Vous aimez les collectors ? Notez que l'édition japonaise de « Seven » se réserve en bonus une version acoustique de « Proud Desperado» avec violon, violoncelle, percussions et choeurs d'enfants.

Les dossiers d'Ahasverus : La story CARCARIASS

Le 12/03/2023

Carcariass a su évoluer, s'éloigner de ses racines sans s'en détacher, rendre « Afterworld » accessible à un public plus large sans se renier.

Les débuts :

C'est en 1994 que Carcariass naît à Besançon. Il compte dans ses rangs Pascal Lanquetin et Bertrand Walter (guitares), Raphaël Couturier (chant, basse) et Bebert (batterie).
Le groupe emprunte son nom au grand requin blanc : carcharodon carcharias.
Carcariass sort sa première démo cinq titres (« Ancestral War ») en 1996 et son premier album studio un an plus tard. Il s'appelle « Hell On Earth ». La quatrième piste de cet opus porte le nom du groupe.  L'album, où la technique s'impose déjà, fonctionne encore bien aujourd'hui.
En 1998 Carcariass revient avec « Sideral Torment ». La guitare se fait plus mélodique et l'album se permet un instrumental (« Void Attraction »).

La reconnaissance :
2002 marque un net palier pour Carcariass. Le son du troisième album, « Killing Process », a été confié à Stéphane Buriez (Loudblast).
Carcariass 1
« Killing Process » est introduit par des arpèges sublimes, il est beaucoup plus élaboré que ses prédécesseurs et l'artwork est d'un meilleur goût. Le groupe n'hésite pas à placer quatre instrumentaux. Parallèlement, Carcariass s'impose sur scène aux côtés de grands noms en devenir, tels que Benighted ou Supuration. A l'international, il aura l'occasion de côtoyer Impaled Nazarène et Cradle Of Filth.
Il faut attendre 2009 pour entendre un nouvel album, et c'est à nouveau à Stéphane Buriez que Carcariass fait appel pour le son de ce « E-Xtinction ». Les guitares restent virtuoses (« In Cold Blood ») et s'il ne vous cueille pas d'entrée comme « Killing Process », « E-Xtinction » reste très agréable.
2012. Le label du groupe, Great Dane Records, présente une compilation des deux premiers albums, « Hell On Earth » et « Sideral Torment », remasterisés et réunis sous le nom de « Hell and Torment ». Alexandra V. Bach (Adagio, Tarja, Kamelot) donne à ce bain de jouvence un artwork digne de ce nom.
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Bien qu'il honore quelques prestations scéniques (un Hellfest sur la scène Altar en 2017), et si l'on excepte une réédition en 2016 de l'album « Killing Process » agrémentée de deux titres-bonus avec des invités ainsi que d'une version remasterisée du morceau « Sideral Torment », il faudra attendre 2019 et « Planet Chaos » pour découvrir le nouveau visage de Carcariass.
La mutation :
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Le Suisse Jérôme Thomas (Science Of Disorder) rejoint le groupe et ses propositions au chant ouvrent de nouveaux horizons à un album qui fait la part belle aux instrumentaux (six !) et qui intègre un synthétiseur pour la première fois dans l'histoire du groupe.
Les textes de « Planet Chaos » sont globalement futuristes, cependant que « Letter from the Trenches » s'inspire de courriers écrits par des Poilus à leurs familles.

Le death de Carcariass est toujours brillamment progressif et accessible (« Battleground »). Pour le son, Carcariass a fait appel à Drop (Samaël) et à Jens Bogren (Sepultura, Arch Enemy). « Planet Chaos » reçoit un chaleureux accueil critique et marque une évolution notable quant au territoire musical de la formation. Le groupe définit son périmètre entre trois piliers : Iron Maiden, Death et Coroner. Interrogé par Metal Eyes quant au style pratiqué par le groupe, Raphaël Couturier (basse) botte en touche : « Avant on se définissait comme un groupe de death metal, maintenant, est-ce qu’on en fait encore ou pas ? On s’en fout, on fait la musique qui nous plait. »
2023 marque le retour aux affaires de Carcariass qui sort le 03 mars son cinquième album, « Afterworld ».
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Jérôme Thomas est à nouveau au chant et le groupe a fait appel à la même équipe de production (Drop/Bogren). Pour autant le style de Carcariass a encore évolué, s'imposant au-delà des genres. Les mélodies death et heavy sont magnifiques et le chant de Jérôme Thomas donne au groupe un ton particulier qui peut évoquer parfois SUP ou Paradise Lost. Les instrumentaux trouvent toujours leur place. Carcariass a su s'éloigner de ses racines sans s'en détacher, rendre « Afterworld » accessible à un public plus large sans se renier.

Carcariass fait fi des genres et affine le sien propre d'album en album. « Afterworld », le dernier en date,  compte parmi les meilleurs de sa discographie et il trouvera, on en prend le pari, sa place dans les Top10 de fin d'année dans les rédactions des webzines de Metal.