Pas grand chose n'échappe à l'auteur : les fans, les musiciens, l'animateur radio ou le fanzine bourré de fautes d'orthographe. VIOLENT INSTINCT est un roman de Saad Jones sorti en 2017. Il s'intéresse à l'univers du Métal en général, et aux tribulations d'une formation Death en particulier.
Le groupe touchera la gloire du doigt, moment que choisira son chanteur Tilio pour partir en vrille et s'interroger sur la profondeur de ses textes Death-Metalleux.
Pas grand chose n'échappe à l'auteur : les fans, les musiciens, l'animateur radio ou le fanzine bourré de fautes d'orthographe s'animent sous nos yeux amusés. ue ceux que le Metal extrême rebute se rassurent : on n'est pas spécialement dans cet univers, on croise d'ailleurs au festival HeavyDays de Goodrington Castle un énorme groupe nommé White Iron qui devrait fédérer tout le monde... Passé cette première impression qui vous a collé le sourire aux lèvres comme Wayne's Wolrd en son temps, on est vite pris par la trame du roman. Il y a une véritable histoire dans laquelle Saad Jones parvient à vous embarquer en deux-cent cinquante pages. Ecrit en 2017, Violent Instinct, va bien au-delà de la private-joke entre initiés, et les exemplaires restants méritent d'échapper au pilon ! Il vous réjouira dans la bibliothèque du salon.
En 2017, nous découvrions “Violent Instinct”, un roman qui s’attachait aux pas d’HM, un trio de Death Metal en route pour la gloire ou pour l’enfer.
Du photographe à l’animateur de radio, du chroniqueur de fanzine à l’organisateur de festivals, tout le petit monde du Metal se retrouvait dans ce livre savoureux et haletant. Refermer sa dernière page nous avait laissé sur notre faim, et la perspective prochaine d’une suite à Violent Instinct nous a paru le moment idéal pour poser quelques questions à son auteur.
Voici notre interview de Saad Jones.
Bonjour Saad Jones. Je te propose de commencer cet entretien avec un saut dans le passé : premier album acheté ?
Saad Jones : Je dois t’avouer ne me souviens pas du premier album que j’ai acheté. Adolescent, je recopiais plutôt les cassettes que mes camarades me prêtaient, jusqu’à ce que je puisse me les payer. Si mes souvenirs sont bons, ma première vraie discothèque contenait Violator de Depeche Mode, Nevermind de Nirvana, le Black Album et And Justice for all de Metallica, et Chaos AD de Sepultura. Je me rappelle une époque où pour obtenir des albums de Metal, je devais les choisir sur catalogue et les commander. Je choisissais les albums en fonction des chroniques de Hard Force Magazine, et tout mon argent de poche y passait.
Premier concert ?
Je n’ai pas assisté à beaucoup de concerts quand j’étais jeune car je vivais dans une petite ville (je me rattrape depuis), mais je me souviens d’un concert de Metallica à Paris en 1996 pendant lequel j’ai perdu contrôle de moi-même. Quand les four horsemen sont entrés un par un dans Bercy pour monter sur leur scène en 8 et jouer tous leurs classiques, je me suis mis debout sur mon siège et je suis devenu fou… J’ai pris une grande claque ce jour-là.
Comment as-tu découvert la littérature ?
Tout d’abord, je dois t’avouer que ne suis pas un « littéraire ». Je préfère me présenter plutôt comme un conteur, car mes références en littérature sont très limitées, même si j’aime lire. J’ai toujours eu des livres chez moi mais bien moins que des albums de Metal !
Depuis que j’ai commencé à écrire et faire la promotion de mon roman, je lis beaucoup plus, notamment les ouvrages d’autres écrivains rencontrés au fil de mes voyages. Cela m’aide à comprendre certains processus d’écriture, mais aussi à définir ce que j’ai envie d’écrire et de raconter.
En lisant Violent Instinct, je n'ai pas pensé un instant qu'il s'agissait d'un premier roman. Il est très abouti. Quel chemin t'a amené à l'écriture ?
Artiste dans l’âme et dans le geste, je suis venu à l’écriture par défaut car, je le répète souvent, écrire a été à un moment de ma vie le seul moyen de créer. Dans les trains et les avions, ne pouvant plus peindre ou jouer de la musique, je me suis mis à écrire une histoire que j’avais en tête depuis longtemps et que j’ai nourrie de mes voyages.
Violent Instinct est en effet mon premier roman, mais écrire est devenu pour moi indispensable. Je suis en ce moment en train de mettre en place la structure de mon troisième roman, et je me retiens de ne pas commencer à tapoter sur mon clavier pour voir mes personnages s’animer. C’est devenu un élément essentiel de ma vie.
Saad Jones avance masqué. Ce personnage au masque noir et or, ce n'est pas uniquement pour préserver ton anonymat...
Garder mon anonymat est essentiel, et le sera de plus en plus, mais la manière dont je me présente, masqué, costumé, silencieux en public, s’inscrit aussi dans une démarche artistique. J’ai le souhait de garder une certaine cohérence entre ce que j’écris et l’image que je renvoie. Ayant travaillé sur la dualité (celle de mes personnages comme de la mienne), j’ai souhaité proposer un visage double à mes interlocuteurs, avec ce masque sombre d’un côté et doré de l’autre. De même mon nom de plume à un double sens, car « sad » en anglais veut dire « triste » alors que « saad » en arabe signifie « heureux ».
"J’ai vécu personnellement beaucoup de scènes de Violent Instinct, même les plus étranges."
Violent Instinct est tout à la fois drôle, truculent et dramatique. Mais toi, Saad Jones, tu écris plutôt dans la douleur ou dans la joie ?
Je suis toujours surpris quand on me dit que Violent Instinct peut être drôle !
Je n’écris pas dans la joie, ni même dans la douleur, mais je choisis souvent de travailler avec un fond sonore approprié à la scène que je suis en train d’écrire. Je dirais que j’écris plutôt « sous tension », en essayant de « vivre » ce que j’écris, en déroulant le film des actions et en me plaçant physiquement dans la peau de mes personnages.
Tu as joué dans des groupes et ça se voit, les personnages et l'univers de Violent Instinct sentent le vécu ! J'ai, pour des raisons personnelles, adoré le fanzine HM Blog dont le rédacteur est fâché avec l’orthographe ! Y a-t-il une part biographique dans Violent Instinct et des gens de ton entourage ont-ils cru se reconnaître ?
Je ne pense pas que des gens de mon entourage puissent directement se retrouver dans les personnages de mes romans mais, inconsciemment, j’ai dû poser sur papier des éléments de ma vie. Certains personnages ressemblent forcément à des gens rencontrés lors de mes nombreux voyages, et Tilio, mon personnage principal, contient beaucoup de moi. Par exemple, comme Tilio, découvrir le Liban a modifié ma vision du monde, de la politique, de la religion, des relations entre les êtres humains…
J’ai vécu personnellement beaucoup de scènes de Violent Instinct, même les plus étranges. On dit que le premier roman d’un écrivain est le plus personnel, c’est sans doute vrai mais j’ai tout fait pour le cacher... Je sais que tu aimes Albert Camus, mais quel livre emmènerais-tu sur une île déserte ?
J’emmènerai sans doute leguide de survie en milieu hostile ou comment construire un trimaran en feuille de palmier… J’aime la solitude, je la chéris, mais je reste un humaniste, et un humaniste ne peut pas accepter de vivre coupé de ses semblables.
Artiste à facettes, tu avais initié des planches dans l'idée de publier Violent Instinct en bande dessinée. Tu nous en montrerais un bout où tu n'aimes pas qu'on regarde par dessus ton épaule quand ce n'est pas fini ?
L’histoire de Violent Instinct devait voir le jour en BD, et j’avais commencé à travailler les premières planches (que je veux bien partager). Malheureusement mon dessin est trop enfantin et ne correspondait pas à la gravité que je voulais mettre dans l’histoire. De plus, j’ai trouvé dans l’écriture une liberté incroyable que je ne retrouve pas en dessinant.
Cependant, j’aimerais bien un jour peindre et publier des scènes de mes romans. C’est un projet qui me tient à cœur. Cela arrivera sans doute avec la sortie du troisième épisode de la trilogie Violent instinct.
Ton actualité, c'est un nouveau roman. Il commence en Afrique, et le mot "Metal" n'apparaît qu'à la fin du quatrième chapitre. Est-il trop tôt pour en savoir plus ?
Pas du tout, la suite de Violent Instinct, qui aura pour titre Red Roots, sortira en décembre 2019. J’ai déjà mis en ligne le (court) prologue et la couverture que j’ai réalisé en collaboration avec l’artisane finlandaise solekoru.
Ce roman se déroulera entre l’ile de Madagascar et la Norvège. Évidemment, mes lecteurs retrouveront plusieurs personnages de Violent Instinct, mais je leur laisse le soin de découvrir lesquels.
A quoi occuperas-tu les prochains mois ?
J’ai énormément de projets autour de mon activité d’écrivain, et ils doivent s’ajouter à une vie personnelle déjà bien chargée ! Outre la sortie de Red Roots et sa promotion, j’espère pouvoir organiser quelques rencontres avec mes lecteurs dans des lieux Metal en 2020. Je serai sans doute en Aout au Motocultor Festival car j’y ai passé des moments merveilleux cet été, mais j’aimerai aussi être présent au Salon Livre Paris 2020, au Hellfest et à la Convention Metal de Paris en octobre 2020. Je dois également terminer la traduction en anglais de Violent Instinct et finaliser la structure de mon troisième roman Dark Desires (titre provisoire) pour terminer la trilogie, en plus de trouver du temps pour travailler avec mon camarade photographe Colin du Mont.
Tu parles de “suite” et de “trilogie”. Ton nouveau roman, Red Roots, pourra-t-il être lu indépendamment de Violent Instinct ?
Il pourra bien sûr être lu indépendamment, mais avoir lu préalablement Violent Instinct permettra d’en profiter pleinement. Il en sera de même pour le roman suivant.
Merci Saad Jones d'avoir répondu à mes questions.
C’est toujours un plaisir.
Cet essai changera l' amateur du genre des anthologies plates, des études clichesques.
Après avoir rappelé les débuts violents de la scène extrême, Nicolas Walzer, spécialisé dans ce style musical et dans le satanisme, s'attelle aux particularités du public français. Il interroge des membres de formations (Your Shapeless Beauty, The Old Dead Tree, Anorexia Nervosa, etc), ainsi que d'autres acteurs, managers, responsables de labels, chroniqueurs de radio ou de webzines.
Le sociologue développe son analyse sur 400 pages agrémentées de quelques photos en noir et blanc. Si la qualité des photos est moyenne, l'essai est, quant à lui, tout à fait intéressant, malgré un panel de contributeurs très réduit.
S'interrogeant sur l'éthique, l'évolution des musiciens, les rapports à l'argent, la notoriété, les dérives norvégiennes ou le satanisme, Nicolas Walzer débusque et analyse les réactions et les comportements des personnes interrogées. Il les compare enfin à celles de l'adepte d'autres cultures musicales.
On sent dans cet essai que l'auteur évolue en terrain connu et qu'il est encarté au parti métallique. Son analyse n'en est pas moins intéressante quand elle pointe du doigt les paradoxes de notre subculture. Ses observations sur les mécanismes de ce courant musical ouvrent parfois la porte à des réflexions plus vastes sur les groupes humains.
Le sympathisant Walzer nous ouvre les yeux sur un échantillon social déterminé, et finalement très conformiste dans sa marginalité. Il offre une analyse intéressante des codes et des intentions. Son essai changera l' amateur du genre des anthologies plates, des études clichesques ou de certaines biographies écrites avec les pieds qu'on trouve souvent dans les librairies au rayon musique. Le non-initié trouvera quant à lui un portrait du métalleux (extrême ou pas, même combat !) cohérent et éloigné des clichés grotesques trop souvent répandus par certains médias qui ne veulent pas distinguer les vessies des lanternes et font croire au grand public qu'une culture musicale marginale est une armée révolutionnaire en marche, malgré que Mick Jagger nous l'ait expliqué en 1974 : it's only rock'n roll !