Rock

VIVA LA WOLFE (grunge), Prosperity (24/11/2023)

VIVA LA WOLFE (grunge), Prosperity (24/11/2023)

Le 27/11/2023

Entre Black Sabbath et Alice In Chains, Viva La Wolfe ne manque ni d'inspiration ni de souffle pour restituer ses racines.
Par Ahasverus

On n'a pas réussi à gratter grand chose sur ce Viva La Wolfe, peu loquace sur son passé. On sait tout de même que la formation est originaire d'Esbjerg, une ville qui possède le port le plus important du Danemark sur la Mer du Nord, et que le quintette est en ordre de marche depuis au moins cinq ans puisqu'il sortait un single-clip bien abouti dès 2018.
En 2023 c'est avec un long format que Viva La Wolfe refait parler de lui via le label français M&O Music. L'album s'appelle « Prosperity ».

Viva la wolfe prosperity

C'est d'abord dans les champs que souhaite nous entraîner l'équipe danoise ; elle annonce sa rusticité, privilégiant le noir et blanc dans un premier single-clip.

Rusticité restera le maître-mot de cet opus de cinquante-trois minutes : rusticité dans le son, crade jusque dans les arabesques de la guitare de « Paralysis » ; rusticité dans les figures tutélaires que ne manquera pas de vous évoquer l'écoute des neuf morceaux.
C'est certainement le nom de Black Sabbath qui vous viendra à l'esprit, « Justice », « Breath Out », « Despot » ou « Leech » ayant une parenté avec les premiers albums du quatuor de Birmingham, mais ce sont encore plus les similitudes avec le Alice In Chains de Layne Staley qui vous frappera à l'écoute du titre « Long Gone », qui aurait parfaitement pu compléter la setlist de l'album « Jar Of Flies ».
Un possible rapprochement avec le son d'un Pearl Jam ne vous échappera certainement pas non plus sur des titres comme « In The Fields » et « Druid's Trail ».
Tanguant parfois sans jamais tomber, Viva La Wolfe n'en abat pas moins un grunge puissant (« LAX »), sans fioritures, désinvolte tout au long d'un premier album sombre. Pleinement maîtrisé, d'un caractère affirmé, « Prosperity » glisse nonchalamment comme un esquif fendant les eaux d'un marais saumâtre (« Justice »). Efficace et archaïque, il impose Viva La Wolfe, qui ne manque ni d'inspiration ni de souffle pour restituer ses racines. Une sortie intéressante, qui révèle un groupe au potentiel certain. Il pourrait trouver un public qui ferait bien de le suivre.

Viva la wolfe« Prosperity » est disponible depuis le 24/11/2023 chez M&0 Music.

BERNARD LAVILLIERS (rock), Métamorphose (17/11/2023)

BERNARD LAVILLIERS (rock), Métamorphose (17/11/2023)

Le 18/11/2023

« Cet album est une vraie bonne idée, tentante comme une confiserie, et elle est certainement la pièce qui manquait à la discographie du Stéphanois.  »
Lavilliers metamorphose

Par Ahasverus


Pour son vingt-quatrième album studio, après l'intimité de  « Sous un soleil énorme » (2021) imposée par la pandémie qui mettait à distance les musiciens du monde, Bernard Lavilliers a décidé de revisiter son répertoire en réenregistrant au studio Guillaume-Tell de Suresnes treize de ses morceaux au milieu d'une cinquantaine de musiciens.
L'idée, explique le chanteur, est née voici un an tandis qu'il donnait un concert unique à la Maison de la Radio avec l'orchestre de Radio France. Accompagné par Vincent Faucher à la guitare, Antoine Reininger à la basse, Xavier Tribolet aux claviers et Michaël Lapie à la batterie, Lavilliers propose donc treize chansons de son répertoire remaniées à la sauce symphonique ainsi qu'un inédit,  « La Bandiera Rossa » (traduisez « Le Drapeau Rouge »), un morceau inspiré par un chant révolutionnaire italien.

S'il conserve son timbre intact, Bernard Lavilliers se fait discret pour donner la priorité aux orchestrations remarquables de Cyrille Aufort. Le bain de jouvence e l'arrangeur habille les compositions d'une élégance sans les trahir, et les fans du Stéphanois apprécieront de retrouver sous cette forme les visages familiers de « Betty », « Noir et Blanc », « Petit », « Attention Fragile », « La Grande Marée », « Les Mains d'Or », « Traffic » et quelques autres. Ils pourront regretter quelques grands absents (« La Salsa » en tête) mais le répertoire de Lavilliers est si riche qu'il faudrait cinq volumes symphoniques pour satisfaire le monde.

Reste que cet album est une vraie bonne idée, tentante comme une confiserie, et qu'elle est certainement la pièce qui manquait à sa discographie. Il en existe une édition agrémentée  d'un CD de neuf titres supplémentaires issus du concert-hommage à Léo Ferré de 2006.
La tournée qui suivra à partir de mars 2024 est à ne pas rater : Lavilliers envisage de se produire avec des orchestres régionaux. Hâtez-vous pour réserver vos billets car certaines dates affichent déjà sold-out !
Lavilliers concerts

RUMKICKS (punk rock), Born Rude (27/06/2023)

RUMKICKS (punk rock), Born Rude (27/06/2023)

Le 11/11/2023

Un instantané punk-rock frais comme un Ramones.
Par Ahasverus
Rumkicks band3Rumkicks est un groupe de punk rock qui a pris naissance en Corée du Sud aux alentours de 2019.
Les Séoulites ont construit leur succès à l'aide de singles et d'un EP (« Brutality », 2020) mais aussi d'une image, et c'est cette alchimie globale a permis au trio de se faire remarquer et d'exporter leur musique à l'international.
L'ascension ne s'est pas faite dans la facilité si l'on en croit ce que le groupe expliquait au magazine Devilution dans une interview de 2022 : « La Corée est un pays très conservateur qui ne vous permet pas de vous teindre les cheveux. Yeawon (NDLR : chant/guitare) porte une perruque quand elle va au travail, une perruque noire. Ici, au Royaume-Uni, il existe de nombreux tatouages. C'est illégal en Corée. » 
L'engouement du public est désormais acté et il a permis à Yeawon et à son gang de partager la scène avec des formations aussi réputées que Bad Religion et The Exploited.
En juin 2023 Rumkicks revenait avec un album intitulé « Born Rude ».
Rumkicks coverLa création de « Born Rude » s'est faite sous pression : 
« Normalement, nous écrivons une chanson lorsque nous avons une idée, expliquait le groupe à Devilution Magazine. Mais cette fois, nous avions une date limite pour l’album donc nous avons dû écrire de nouvelles chansons le plus vite possible. C’était une période assez difficile pour nous car rien ne nous venait à l’esprit. »
Rumkicks par nagoyaRUMKICKS par Nagoya
Pourtant les treize compositions signées Yeawon, dont nombre, déjà sorties en singles, ont été réenregistrées pour cet album, sonnent juste. 
Côté lyrics (en Coréen ou en Anglais)  la frontwoman a puisé dans les expériences personnelles du groupe. Ainsi « Don't Touch My Head » naît d'une anecdote de tournée, tandis que l'une des filles après un concert voyait un homme ivre tenter de toucher ses cheveux sous la douche. « Punk Is Nowhere », autre exemple, est une réponse à des attaques de haters reçues sur les réseaux sociaux.
Allant à l'essentiel, la formation coréenne délivre en trente minutes des chansons dont l'efficacité n'a d'égale que la simplicité, à l'instar des « Drinking Everyday » et « Rude Girl Oï » qui ouvrent l'album.

Les mélodies dégagent fluidité et énergie et doivent plus aux Ramones (« Punk Rocker », « Goodbye Song », « Punk Is Nowhere ») qu'à la pop punk cependant présente (« I Don't Wanna Die »). 

Qu'on ne se méprenne pas : parler de simplicité à propos des titres alignés sur ce  « Born Rude » n'a rien de péjoratif. A grands coups de « Oï » et de répétitions rythmiques, Yeawon développe un talent de hit maker certain et permet aux  Coréennes de réaliser un instantané punk-rock frais comme un Ramones. C'est une pleine réussite qui ne connaît aucune perte et qui contribuera à parfaire la fanbase déjà conséquente des Rumkicks.

 

DUMMY TOYS (punk rock), War Is Nightmare (07/06/2023)

DUMMY TOYS (punk rock), War Is Nightmare (07/06/2023)

Le 01/11/2023

« Aucun des neuf morceaux présents sur cette galette ne veut relâcher la pression et arriver dernier. »

Dummy toysPar Ahasverus
Qinhgdao est une ville côtière de l'Est de la Chine réputée pour... sa bière ! Le groupe de punk-rock chinois Dummy Toys ne pouvait donc trouver meilleur endroit pour se développer au pays du Milieu.
Dummy Toys est un quatuor féminin. En 2020 il propose un premier album au titre clair : « Not A Puppet ». Les filles n'ont pas l'intention de faire tapisserie et elles balancent douze titres d'un punk-rock ramassé avec des morceaux courts pouvant se montrer extrêmement nerveux (« Adespota Thing »). Loin de se crisper sur son rocher, Dummy Toys tente même une approche originale avec une rythmique ragga sur le morceau « Anti Sweet Girl  ».

L'ouverture rappelle The Clash. Par ce trait et par d'autres 
propositions, « Not A Puppet » n'est pas sans présenter quelques similitudes avec la discographie de la formation britannique (« City Of Dead  » ), tandis qu'un titre comme « DMC Baby » nous ramène plutôt aux débuts de Blondie.

   
On trouve donc beaucoup de qualités dans le matériel des Dummy Toys, avec un premier long format particulièrement respectable qui peut aussi présenter un visage hardcore (« Flying Young Girl », « Mentally Deficient » ).
C'est sur ce côté hardcore qu'appuie Dummy Toys quand il sort son second album, « War Is Nightmare », le 07/06/2023.
Dummy toys cover« Peu importe que la mélodie ne sonne pas bien aux oreilles du grand public ou ne lui plaise pas assez, nous voulons simplement faire entendre notre musique fort sans avoir à en expliquer le sens », peut on lire sur le Bandcamp du groupe.
Avec des titres extrêmement vifs, le gang chinois ne peine pas pour faire entendre ses intonations à la Slayer ou à la Death Angel (« Stop Your Control », « Wake Up »).

Les nouvelles compositions sont faites d'une écriture très serrée, avoisinant généralement les deux minutes, et pas une piste ne passe au dessus des 03:18. Il semble qu'aucun des neuf morceaux présents sur cette galette ne veuille relâcher la pression et arriver dernier.
Dummy Toys réussit ainsi un album de punk furieusement efficace et hardcore (« Network Mob »), avec des slogans marquants (Do not forget / Do not forgive  — Disaster). D'ailleurs le groupe assure : «  Même si nous savons qu'il n'y a pas grand chose à changer, nous voulons quand même rester toujours éveillés. ».

« War Is Nightmare » est donc un album qui dépote, un concentré d'énergie punk beaucoup plus choquant que son prédécesseur, et la puissance dégagée par le songwriting force le respect. Ces ving-trois minutes suffisent  clairement à Dummy Toys  pour enclencher la vitesse supérieure. De même, elles suffiront à vous botter le cul. Une recommandation cependant : le son des plateformes de streaming peut présenter des faiblesses. Nous vous conseillons de privilégier l'écoute sur Bandcamp qui proposera une bien meilleure qualité : https://dummytoyspunk.bandcamp.com/album/war-is-nightmare

7 WEEKS (rock), Fade Into Blurred Lines (13/10/2023)

7 WEEKS (rock), Fade Into Blurred Lines (13/10/2023)

Le 19/10/2023

« Fade Into Blurred Lines » conduira vos émotions aussi sûrement que le cuivre conduit l'électricité. 
Par Ahasverus

7 weeks album du mois

Voici la nouvelle livraison de 7 Weeks. Elle s'appelle « Fade Into Blurred Lines ».
Nous l'abordions avec une pointe de doute : nous avions adoré « Sisyphus », l'un des meilleurs albums de rock de l'année 2020,  et voici que 7 Weeks entendait rebattre les cartes dans une formule trio avec un album « enregistré live, sans artifice » que le dossier de presse estimait « moins solaire, plus terrien ».
Ne laissons pas s'installer le suspense plus longtemps : nous avons trouvé l'opus excellent au point d'en faire notre album du mois dans notre newsletter n°11.
Nous voila rassuré  : dès le premier morceau, « Gorgo », on retrouvait l'ADN inaltéré du groupe, cette voix caractéristique, ces rythmiques vrombissantes, cette guitare indépendante, toujours en mouvement, enfin cette élégance permanente dans le placement.
7 Weeks lachait « Gorgo » en premier single, disant à son sujet : « Gorgo parle de fuite en avant, du rapport intime au monstrueux, des jours sombres qui pétrifient quand on ose les regarder en face. Texte symbolique, Gorgo illustre la crise de sens que nous traversons et les lignes de fuite que nous créons pour y échapper : repli sur soi, confort viral et illusoire, certitudes figées. On avait cet arpège crimsonien en stock ainsi que cette image d’un personnage qui se retrouve figé face à ces certitudes. On a  donc combiné les deux idées avec l’image de la Gorgone mythologique. »  

Certes, d'autres morceaux sont possiblement plus radicaux, et le son préparé par Pascal Mondaz est peut-être légèrement plus brut, plus crissant. Mais l'identité de 7 Weeks est affirmée et sa signature reste heureusement omniprésente.
Entre explosivité (« Blackhole Your Heart ») et émotion (« Mute »), le trio ne tranche pas.

Il alimente son fourneau avec la même classe, et bien que ses ingrédients soient différents de cette formation, nous sommes tenté de le comparer à Screaming Trees pour sa marginalité dans le grunge rock et pour la beauté évidente qui habille certains morceaux.
Finalement la parenté de « Sisyphus » à « Fade Into Blurred Lines » s'impose, non par une gémellité mais bien par un air de famille. « Fade Into Blurred Lines » suit son propre chemin mais n'aura rien à envier au remarquable « Sisyphus ». Comme lui, il fait mouche, qu'il serpente paresseusement (« Shimmering Blue », « Castaway »), qu'il parte à bride abattue, effréné et strident (« Wax Doll »), ou qu'il évoque des images western (« Windmills »).
« Fade Into Blurred Lines » se referme en finesse avec l'intime « Travellers ».
On apprécie que 7 Weeks n'ait rien lâché après  « Sisyphus » : il a posé sa patine sur chaque note de « Fade Into Blurred Lines ». Le résultat est infiniment séduisant et conduira vos émotions aussi sûrement que le cuivre conduit l'électricité. 
« Fade Into Blurred Lines » est notre Album du Mois. Il saura illuminer votre octobre 2023.

BRIAN SETZER (rockabilly) The Devil Always Collects (2023)

BRIAN SETZER (rockabilly) The Devil Always Collects (15/09/2023)

Le 18/09/2023

« The Devil Always Collect » s'écoute tellement bien qu'il file comme une balle sur un lecteur en pente !
Par Ahasverus
Brian Setzer amorce sa tracklist avec énergie, comme pour affirmer qu'il en a sous le pied (« Rock Boys Rock », « The Devil Always Collect ») avant de nous entraîner vers un rockabilly plus 50's, pas si éloigné de la country (« Girl On The Billboard »).

Ceci fait, le voila qui swingue (« A Dude'll Do (What A Dude'll Do) », fait des oeillades à « Cut Across Shorty » (« Play That Fast Thing (One More Time) »), bifurque vers un blues à la Gene Vincent (« The Living Dead »), flirte avec la soul (« She’s Got A Lotta...Soul! ») pour conclure par un groove jazzy à la « Fever » (« One Particular Chick »).
Rien à reprocher à ce voyage dans les 50/60's,  suivez le guide, jamais nostalgique, toujours dans l'action. Pour vous démontrer que c'était pas mieux avant, il s''éclaire parfois de morceaux plus actuels, tels  « Black Leather Jacket », très efficace, ou « Psycho Suzie », mélange de tradition (le rythme) et de modernité (le son).

Fidèle à ce qu'il est, à ce qu'on attend de lui, quasi académique, excellent chanteur, musicien créatif , guitariste reconnu qui discute en permanence avec son instrument  (« What'll It Be Baby Doll? », « She’s Got A Lotta...Soul! », « A Dude'll Do (What A Dude'll Do) »), Brian Setzer s'y entend bougrement pour faire swinger les rythmes et pour nous régaler. Il reste l'un des gués les plus sûrs pour retourner aux sources du rock sans se mouiller les pieds dans la pantalonnade (suivez mon regard). Le rocker de New-York réussit là encore un album au pas sûr, efficace et sans faille. Si le genre vous est familier, vous n'allez pas être déçu, si ce n'est par ce constat qui vous prendra à la toute fin : c'est passé trop vite ; « The Devil Always Collect » s'écoute tellement bien qu'il file comme une balle sur un lecteur en pente ! Fans de rock, rassurez-vous : Brian Setzer n'a rangé ni sa Gretsch, ni sa banane blonde ni son perfecto ; il garde son énergie intacte, son inspiration tout autant.
Brian setzer

ARBORN (rock), Se Jouer (08/09/2023)

ARBORN (rock), Se Jouer (08/09/2023)

Le 17/09/2023

L'ambiance générale installée par Arborn reste chaleureuse, tamisée, douce jusque dans ses thématiques les plus sombres.

Par Ahasverus
Stéphane Leborgne, alias Arborn (le borgne en langue bretonne), est un auteur-compositeur-interprète-multi-instrumentiste et producteur français.
Arborn band
On lui doit notamment le « Tour du monde en 80 instruments », un projet musical et pédagogique, ainsi que le « Merveilleux Voyage d'Alan, des Côtes Bretonnes aux Terres Africaines » un conte qui permet de découvrir une quarantaine d'instruments ethniques. Il a enfin, en 2017, sorti un premier long format aux compositions toujours très recommandables qui mélangent bombarde, percussions,  piano, cornemuse, orgue, flute et encore harmonica : « Le Banquet des Moutons ».
Arborn revient le 08/09/2023 avec treize nouveaux titres pour un deuxième album, « Se Jouer », qu'on accueille avec bienveillance et curiosité.
Arborn
Ce nouvel opus présente une variété française légèrement imprégnée de folk (« Ca Me Va d'Être Moi », « Rien Ne s'Oublie »), de blues (« Souveraine »), de rock (« Ivre de Nuit », « Vainqueurs et Vaincus »), largement saupoudrée d'influences celtiques (« Le Rire de Mary », « L'Homme A La Cornemuse », « La Fille Au Parapluie »). Il se fait généreux et musical, laissant une impression d'agréable simplicité même quand ses instrumentations s'avèrent riches et variées. Il est une suite de mélodies fluides aux allures autobiographiques (« Le Locataire », « On T'Aime Encore Suzy », « La Fille Au Parapluie »), en tous cas intimistes, parfois graves et impliquées (« Pour Un Monde Meilleur » ). Le tout est bien écrit (Arborn a collaboré dans ce domaine avec Boris Bergman, le parolier de Bashung) et l'ambiance générale qu'il déroule reste tamisée, chaleureuse, douce jusque dans ses thématiques les plus sombres. Si le propos de « Se Jouer » n'est pas de vous faire headbanguer vous pourrez tout de même taper du pied quand les guitares viendront vous chercher (« Le Locataire »). « Se Jouer » est surtout une nouvelle proposition de la scène française, séduisante, soignée et bien autoproduite. Elle n'est pas dépourvue d'originalité et vous aurez plaisir à découvrir sa signature. 

RICK SPRINGFIELD (rock), Automatic (04/08/2023)

RICK SPRINGFIELD (rock), Automatic (04/08/2023)

Le 31/08/2023

« Mon objectif était de solides morceaux de trois minutes avec les plus gros refrains que je pouvais trouver. »
Par Ahasverus

Rick Springfield donne une nouvelle preuve de son talent avec un album particulièrement accessible, mélange de rock et de pop, avec une instrumentation d'apparence dépouillée mais finement travaillée. 

Parfois purement pop (« Fake It Til You Make It »), parfois teinté de folk à la Paul Simon (« Come Said The Girl »), de soul (« The Cure For Loneliness »), « Automatic » est plus généralement rock, et c'est massivement un mélange des genres.
Si les compositions de Springfield s'articulent autour des riffs de guitare, ce qu'on remarque ce sont les magnifiques choeurs féminins et les cuivres qui accompagnent ces vingt chansons catchy qui parlent de Dieu, de la mort et du sexe. « C’est essentiellement ce que j’ai écrit sur les dix dernières années, explique l'Australo-Américain. Je suis toujours à la recherche de Dieu, intéressé par le sexe et curieux de la mort. »
L'album s'appelle « Automatic » parce que « les chansons sont sorties d'elles-mêmes », complète l'artiste. « Mon objectif était de solides morceaux de trois minutes avec les plus gros refrains que je pouvais trouver. » De fait, le cahier des charges se voit totalement respecté et les  vingt morceaux bien produits balancent autour de cet axe des trois minutes pour nous garder à leur disposition tout au long des cinquante-huit minutes de l'album.
« Automatic » est disponible depuis le 04 Août 2023. C'est une sortie Songvest Records.
Rick springfield

SERAINA TELLI (rock), Addicted To Colors (25/08/2023)

SERAINA TELLI (rock), Addicted To Colors (25/08/2023)

Le 27/08/2023

Dans la lignée de « Simple Talk », auquel il est peut-être légèrement supérieur, « Addicted To Colors » vous confortera dans l'idée que Seraina Telli est une artiste accomplie qui possède un style bien à elle, généreux, fougueux et intense.

Par Ahasverus

Moins d'un an après « Simple Talk », le premier album réalisé sous son nom, SERAINA TELLI revient avec un second opus intitulé « Addicted To Colors ». 
Seraina telli addicted to color
Première frontwoman de Burning Witches, la Suissesse aux cheveux bleus ou verts, chanteuse, songwriter, multi-instrumentiste, quitte ce combo en 2019 pour fonder son groupe de métal progressif, Dead Venus. Elle nous donne, avec lui, deux beaux albums, « Bird Of Paradise » en 2019 et « Flowers & Pain » en 2022. 
Mais depuis 2022, c'est un nouveau projet dans un nouveau style, que nous propose Seraina.. Avec des titres dans un registre Big Rock/Rock Hard qui ne conviendraient pas à son groupe de prog'.
Ce nouvel album, « Addicted To Colors », s'ouvre par « Song For The Girls », un rock énergique totalement dans la continuité du précédent opus solo, « Simple Talk ».

Très affûté, « Monkey & Zookeeper » enfonce le clou, et si « Left Behind » semble vouloir calmer le jeu il finit lui aussi par s'emballer !
Les titres s'enchainent joliment, parfois très hard (« Think »), le plus souvent débordants d'énergie (« Be Somebody »)
Séraina propose une reprise superbe du « Spaceman » des 4 Non Blondes. Il s'inscrit parmi les temps forts de l'album.

Autres excellents moments : « If No One Else Had Ever Been There Before » et « Addicted To Colors ». Les rythmiques vous embarquent, avec en prime un un beau travail sur les harmonies et les voix, mais aussi sur les lyrics (« Hit Shit ») !

La Suissesse est partout. Elle n'a pas lésiné sur les voix ni sur l'énergie, nette dominante de cet album de rock. Cependant des titres comme « The Harder Way », ou « All Your Tears », qui est un peu à cet album ce que « Remember You » était au précédent, rappellent que Seraina sait aussi passer en finesse et en émotion.
Dans la lignée de « Simple Talk », auquel il est peut-être légèrement supérieur, « Addicted To Colors » vous confortera dans l'idée que Seraina Telli est une artiste accomplie qui possède un style bien à elle, généreux, fougueux et intense.

BERNIE BONVOISIN (rock), Amo Et Odi (09/06/2023)

BERNIE BONVOISIN (rock), Amo Et Odi (09/06/2023)

Le 11/07/2023

Certainement l'album le plus personnel de Bernie Bonvoisin. Peut-être le plus réussi.

Par Ahasverus

« Amo Et Odi » / « J'aime et je déteste ».
C'est le grand écart que Bernie Bonvoisin n'hésite pas à décliner sur son nouvel album solo, le premier depuis treize ans...
Le Francilien a fait appel à ses complices de Trust, David Jacob et Izo Diop, ainsi qu'à Jean-Pierre Bucolo, qui a joué, composé ou arrangé pour Renaud, Francis Cabrel ou Johnny Hallyday. Ils ont travaillé sur trente morceaux en trois sessions de quatre jours. Treize titres sont finalement retenus.
La pochette suggère un selfie devant les ruines d'Alep. 
Bernie bonvoisin
Il est légitime pour pointer nos dérives, Bernie, qui se rendait à Beyrouth en 2016 pour réaliser le reportage « Paroles d’enfants syriens, la misère entre deux jardins ».
Un album, c'est d'abord une ambiance. Sur « Amo Et Odi », slide et dobro se succèdent en lumière tamisée que la batterie fait vibrer.
C'est musicalement l'opus le plus dépouillé de Bernie, textuellement son plus intime.
Il  réserve les choeurs aux occasions, ose le piano-voix pour évoquer son père (« A s'en ouvrir les veines »). C'est comme avancer nu.

La sobriété est si forte que les cris qui ponctuent le rythme de « Si c'était à refaire », à la manière du « Bonny And Clyde » de Gainsbourg, sembleraient presque un pic de sophistication.
Calme et résolu, Bernie Bonvoisin n'a rien lâché de ses engagements (« Allons Zenfants »). Il compose un album au plus près de sa peau, doué d'une vraie force créatrice capable de faire naître des images.
Certainement son album solo le plus personnel. Peut-être le plus réussi. Il est disponible depuis le 09/06/2023.

THE GUESS WHO (pop/rock), Plein d'Amour (30/06/2023)

THE GUESS WHO (pop/rock), Plein d'Amour (30/06/2023)

Le 08/07/2023

Cinquante-sept ans d'expérience et de talent vous parlent.
Par Ahasverus
The guess who band

The Guess Who est un groupe de rock canadien formé en 1965 à Winnipeg. Ca remonte, hein ?
Il a connu son heure de gloire dans les 70, conservant même la première place du Billboard Hot 100 (un classement des cent titres les plus populaires des USA) durant  trois semaines avec le titre « American Woman » (1970) !

Au cours de son histoire, The Guess Who a compté dans ses rangs Randy Bachman (Bachman-Turner Overdrive) et Rudy Sarzo (Quiet Riot).
Une carrière faite d'interruptions et de réunions qui nous amène en 2023 avec le nouvel album : « Plein d'Amour ».
The guess who
« Plein d'Amour » s'ouvre sur le titre « The King », parsemé de superbes harmonies vocales.

Un grand sens de la mélodie et des harmonies chorales s'installent sur la durée, ainsi qu'une douceur certaine.
Les morceaux de The Guess Who sont finement ciselés, avec de belles orchestrations. Clavier, basse, choeurs, guitare, voix, piano, violon, se succèdent ou se mêlent pour atteindre parfois des sommets dans un album qui sent le métier mais qui ne repose pas sur la technique.

Une atmosphère hors du temps se dégage de cet album harmonieux, souvent joyeux, qui renvoie aux Beatles de Paul McCartney pour le sens mélodique et les arrangements, et à Queen pour les harmonies vocales.
La fluidité se dégage de ces mélodies pop-rock d'aspect simple et pétillant, avec quelques incartades folk 70s (« Headline »)  ou hard-rock (« Plein d'Amour »).

Cinquante-sept ans d'expérience et de talent vous parlent. The Guess Who 2023 a conservé assez de jus pour livrer un album hautement agréable et simplement beau, foisonnant de détails aussi sonores que lumineux.  

SHAKA PONK : Un petit tour et puis s'en vont

SHAKA PONK : Un petit tour et puis s'en vont

Le 06/07/2023

Shaka Ponk, à son zénith, prend congé avec un album efficace, sans effets de manches et carrément grand.
Par Ahasverus
1.- SHAKA PONK : La Story
Selon Wikipedia Shaka Ponk tirerait son nom du premier bouddha (Shākyamuni) et d'une tribu amérindienne, mais on n'a rien trouvé à propos de ces Indiens - le peuple Poncas, peut-être ? Ponk est aussi vraisemblablement un clin d'oeil à Punk.
Shaka ponk band
Le groupe se forme en 2002, c'est un collectif rassemblé autour de l'image (leur singe-mascotte ne les quittera jamais) et de la musique. On peut considérer que c'est à Berlin qu'il nait réellement, c'est en tous cas là qu'il prend son envol. Il sort quelques démos et il a l'opportunité d'assurer les premières parties de groupes comme Korn ou Mudvayne. Il signe avec un label allemand (Edel Music), suffisamment professionnel pour lui donner de solides bases. En 2005 il donne naissance à son premier EP, « Hyppie-Monkey », dont quatre morceaux sont repris sur le premier album de sa discographie, « Loco Con Da Frenchy Talkin » (2006). Musicalement, ça fusionne à tout va : guitares heavy, basse funky, ingrédients électro, punk, hip-hop, et des textes en Français, en Anglais ou en Espagnol... Les bases de Shaka Ponk sont posées. Il rompt son contrat avec Edel Music et sort « Bad Porn Movie Trax » en indépendant en 2009. C'est un succès. Shaka Ponk passe à Taratata et se voit nommé aux Victoire de la Musique dans la catégorie « révélation scène de l'année ». Le groupe explique à La Grosse Radio : « On a gagné 100 places de disques en quatre minutes. On a halluciné. On était 204ème – ça faisait presque un an que l’album était sorti – et on est passé à 101ème, après le morceau, donc que du téléchargement et tout ça, enfin ça reste pas énorme, surtout par rapport au monde qui regarde. »

« The Geeks and the Jerkin' Socks », troisième album de Shaka Ponk, voit le jour en 2011. A propos de son titre, Ion (batterie), s'amuse avec Lords of Rock.net : « L’album devait s’appeler The Galactics and the Surfing Jokes. C’est Frah qui avait trouvé ce titre, qui l’avait dit à Sam, qui l’a répété à Steve et au final qui est arrivé à mon oreille, et moi j’ai entendu The Geeks and The jerkin’socks. J’ai trouvé ce titre mortel et on l’a gardé. »  Il s'agit du premier opus avec Samaha Sam (chant), mais elle est présente dans l'entourage du groupe depuis ses débuts. 

Dans une setlist très hétéroclite, l'album se referme sur deux featuring :  le rappeur américain Beat Assaillant participe au morceau « Old School Rocka » et Bertrand Cantat est paradoxalement invité sur le titre « Palabra Mi Amor ».  Marie Trintignant est décédée le 01/08/2003 et Noir Désir a jeté l'éponge voici un an.  « On s’attendait à  se faire un peu taper dessus, mais ça n’a pas été le cas » explique Samaha Sam à Lord Of Rock. « The Geeks and the Jerkin' Socks » est même mieux accueilli que son prédecesseur, il est disque de platine et se voit nommé aux Victoires de la Musique. Shaka Ponk ouvre pour Guns N' Roses lors de son concert parisien.
Le 18/03/2014, Shaka Ponk est nommé chevalier des Arts et Lettres par la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti.
En 2014 et 2015, Shaka Ponk présente deux opus qu'on peut considérer comme un double-album, les compositions de « The White Pixel Ape » et « The Black Pixel Ape » étant issues des mêmes sessions de composition et présentant respectivement la face lumineuse et la face sombre du groupe, comme le suggèrent les pochettes et les titres de ces longs formats.
« The Evol », le sixième album, sort en 2017. Shaka Ponk est à nouveau nommé aux Victoires de la Musique dans la catégorie « Meilleur album de rock français de l'année ». Le groupe profite d'un incident technique (arrangé ?) dans le lancement de son morceau lors de la cérémonie pour prendre une position affirmée sur le changement climatique.

En 2018, Shaka Ponk initie « The Freaks », un collectif de personnalités (Matthieu Chedid, Laurent Baffie, Calogero, Laure Manaudou, Maxime Le Forestier, on ne va pas les citer tous : ils sont soixante-huit à ce jour !)  qui s'engagent pour la protection de la planète etvqui invitent à passer de la parole aux actes en matière d'écologie grâce à une liste de gestes simples élaborés en collaboration avec la fondation Nicolas Hulot. 
En 2020 sort l'anthologie « Apelogies ». Il s'agit d'un triple album composé de morceaux du répertoire réenregistrés, d'inédits ou de raretés et de titres live. Le clip « Funky Junky Monkey » voit Goz, le singe-mascotte de Shaka Ponk, s'incruster sur des images de notre culture collective, de Donald Trump à Clint Eastwood, en passant par Iron Maiden ou l'Arc de Triomphe. Cette chanson raconte l'histoire de ce singe très punk, post humain, qui vient reprendre sa place dans un monde d'où les Hommes l'ont exclu ». 

2.- SHAKA PONK : Le nouvel album :
En 2022, Shaka Ponk, qui a laissé passer la pandémie, commence la préparation de son nouvel album. Il annonce qu'il s'agira du dernier opus, certains membres du groupe ayant décidé de s'investir dans d'autres projets, et notamment, les chanteurs Frah et Samaha, recentrés sur « The Freaks ».
Le dernier opus du groupe est simplement intitulé « Shaka Ponk ».
Shaka ponk album
Il sort le 16/06/2023. Il s'ouvre sur des rock aussi énervés (« D'Essence ») qu'obsédants (« Alegria »,« 3000 Heures »), quand il ne vire pas purement au riff de hard à la AC/DC (« Dad'Algorythm »).

Côté lyrics, « D'Essence » respire à plein poumons la transition écologique qui s'amorce: « Je mène mes gosses à l'école dans cette grosse bagnole / on s'en fout, on s'enfume / il pourront bien aller pleurer leur père sur la lune. » 
Shaka Ponk aime plus que jamais jouer avec les mots et la parenté avec Noir Désir est évidente. A ce titre, « Allegria » est un festival : « Même si la terre est ronde / J'en ai rien à carrer » ; « Si l'enfer est ici, alors autant s'en faire / S'en faire un paradis.» 

Au sommet de son art, Shaka Ponk a privilégié les textes en Français, jouant avec les mots de la contestation :  « Replonge ta face dans ton Iphone / C'est fou comme on se sent bien avec le compteur à copains. »  ; « Il faut suivre le move / Même si le move ment » (« J'aime Pas Les Gens ») ; « Tout le monde danse quand ces gens-là claquent des doigts / Mais moi je danse pas. » (« Tout le monde danse. »)

L'album trouve sa pause avec le suave « Il y a ». « Resign » sonne le glas dans un format à la Skip The Use.
Ainsi Shaka Ponk, à son zénith, prend-il congé de vous avec un album de trente-neuf minutes, efficace, sans effets de manches, carrément grand. Il a su assimiler et synthétiser tout ce qui a fait la diversité et la puissance du rock français. En tournée jusqu'à fin mars 2024, vous pourrez l'applaudir une dernière fois ici : http://shakaponk.com/tournee/. Ensuite, il pourra reposer auprès de La Mano Negra, de Noir Desir et des Négresses Vertes au Panthéon du rock français.

TR3NTE (rock), Cicatrices (15/06/2023)

TR3NTE (rock), Cicatrices (15/06/2023)

Le 03/07/2023

La signature du groupe est forte et singulière. On pense aux voix de Manigance au temps de Delsaux, à Sortilège ou à Antechaos, même si, et c'est bien là tout l'intérêt, le registre de TR3NTE n'est précisément semblable à aucun d'eux.

Par Ahasverus

Tr3nte fait partie de ces formations qu'on retrouve avec plaisir.
C'est frais. Mais pas des jeunots, hein...

Trente le groupe 2
Le groupe prend forme en 1999. Un premier album éponyme en 2004 et un second, « Vu Du Ciel », en 2006. Quelques belles opportunités plus tard, dont une première partie de Great White et de l'ex-White Lion Mike Tramp, Tr3nte appuie sur pause tandis que ses musiciens se dispersent. Steph Reb et Fabrice Trovato rejoignent deux formations pionnières du hard français : Océan pour le premier (ils enregistrent ensemble l'album « C'est La Fin »), Still Square pour le second, qui martèlera les fûts sur les albums « Laissez-Les Rêver » et « Hard Rock N' Roll ».
2018 marque l'heure de la reformation, et c'est en 2021 que nous est présenté « Aveugle et Sourd », le troisième album sorti malgré la pandémie.
Deux ans plus tard, Tr3nte revient avec un quatrième long format : « Cicatrices ».
Trente promo
Si  Mr Big, Foo Fighters et Riverdogs sont les influences citées par le groupe, elles sont difficilement perceptibles dans ses efforts discographiques, tant la signature de la formation française est forte et singulière.
Le chant, d'abord. On pense invariablement à d'autres grandes voix dont les signatures hautes sont au service de textes en Français : l'ex-Manigance Didier Delsaux, le chanteur d'Antechaos, Christophe Billon-Laroute, ou encore Christian Zouille Augustin, le frontman de Sortilège, même si le registre de Steph Reb n'est précisément semblable à aucun d'entre eux. C'est bien là tout l'intérêt. Et sa voix remarquable se marie à merveille avec des textes percutants : 
« On a fait tout comme appris / Traverse au rouge, mon petit / Aime ton prochain comme je suis / Pour une niche au paradis / Sinon quoi ? »
Côté rythmiques, « Sinon quoi » sert d'appât, tandis que « Juste Un Homme Heureux » vous ferre solidement. Puis la voix et la guitare se mêlent (« Derrière Les Persiennes »), une lead mélodieuse qui multiplie les belles interventions tout au long de l'album.
Une voix au registre rare, une guitare lead inspirée, la tâche n'est pas des plus faciles pour le duo basse/batterie qui trouve pourtant son chemin grâce à une mise en place et à une production soignées qui permettent de suivre chaque ligne instrumentale d'un tandem qui n'entend pas jouer les faire-valoir.
Côté riffs, les guitares indiquent la direction, le hard par ici (« Refaire le Printemps »), le blues par là (« Quant à Moi »), mais l'identité du groupe s'impose et place cet album hors de toute étiquette. Génériquement rock, « Cicatrices » ne se départit pas d'une subtilité qui le rend franco-compatible, comme du temps où Calogero prenait le temps de faire de la qualité. On peut même penser à certaines choses de Florent Pagny (« Cicatrices », « Le Jour Où »)... Enfin, vous l'aurez compris, catégoriser cette formation capable d'amener de la finesse jusqu'au coeur du riff le plus punchy (« Humaine, Inhumaine ») relève du challenge.
« Je fais le contraire du convenu / Sans m'interdire d'écrire sur les murs / Le contraire de ce qu'ils ont voulu  » assure Tr3nte.
C'est vrai cette fois encore, et on ne peut que l'inciter à continuer !
Sinon quoi ?

LERKA-JO (punk/fusion), Je Suis Lerka-Jo (24/03/2023)

LERKA-JO (punk/fusion), Je Suis Lerka-Jo (24/03/2023)

Le 27/06/2023

Lerka-Jo, c'est pour du vrai. On n'attendait pas cette artiste au potentiel digne d'une grenade dégoupillée.

Par Ahasverus

« Champagne is fantastic for your brain ! » 
C'est Lerka-Jo qui l'affirme, avec modération, bien sûr !
La pochette psychédélique plutôt kitsch présente une jeune fille assez gironde (mais rien à voir avec le département, Lerka-Jo est Toulousaine !) aux lunettes rouges et à la tenue jaune et noire,  impossible abeille sur un fond zébré de bleu plus ou moins sombre.
Lerka jo
Son logo rose avance en chasse-neige. Pousse devant ! Je passe !
C'est le premier album de Lerka -Jo, un huit pistes de vingt-cinq minutes au titre incontestable : « Je Suis Lerka-Jo ». Il succède à un double single sorti en 2022. Et il est disponible depuis le 24/03/2023.
Yep ! Pétillante comme  ce champagne qu'elle célèbre en introduction de son huit pistes, Lerka-Jo propose un punk-rock d'abord festif . Il vous met d'autant mieux la tête à l'envers que la jeune fille égrène ses paroles débridées au bord d'une piscine, dans une « swimming pool session » aussi minimaliste que sa tenue.

Elle est pas belle la vie ? Cette légèreté est comparable à ces bulles de champagne qui savent si bien nous mettre du baume au coeur.
« Cringe Boom (Hard Step) », en seconde place, écrase la pédale façon hip hop. Gros riffs et chant rappé, mais la musique heavy est cependant brisée par d'imposants claviers. Les langues s'entremêlent, sans qu'on parvienne à les identifier toutes.
Troisième piste. Vous y êtes ? Mine de rien, Lerka-Jo vous a emmené dans les cordes. Maintenant vous allez ramasser ! Ca se passe du côté des lyrics. Gauche ! Droite ! Gauche ! 
« Il était une fois dans une ville lointaine / La plage, la fête, le vin, on imagine à peine / Là-bas avant l'orage, le soleil brillait / Là-bas avant la rage, les voisins s'aimaient. »
Gauche !
C'est que Lerka-Jo est Ukrainienne. Elle est arrivée en France à l'âge de quatorze ans. Sans sa famille. C'est le drame d'une vie, que l'Administration résume en deux mots : « mineure isolée ». C'est ça l'histoire qui vient saloper votre dance floor. 
Tu peux ranger le champagne et les cacahuètes, Robert, c'est mort... « Je suis Lerka-Jo » est l'explication de texte que tu n'attendais pas, et elle a un double des clés. Elle parle Français avec une pointe d'authenticité collée au bout de la langue. C'est ça, l'accent qu'on avait pressenti mais pas identifié.
Son pays, Lerka-Jo, « c'était l'Ukraine, mais maintenant c'est la Russie / Où il fait très froid, mais on boit, y a pas de souci. » 
L'art du débotté, on n'avait rien vu venir.
 La jeune fille au bord de la piscine est partie se changer. Elle a prévenu : les interrogatoires, ça la gonfle autant qu'un contrôle d'identité : aux « Qu'est-ce que tu fais là ? Tu parles bien, tu as galéré ? / Tu fais des études ? Et la France, ça te plaît ? » Elle concède : « Quand on me pose des questions c'est rarement très marrant. ». 
« Je suis Lerka-Jo » est incontestablement le titre- phare de cet album. On ne saura plus le regarder sans son éclairage.
« Citrus On Mars  » voudrait calmer le jeu. Il change de sujet : « J'ai voulu sortir toutes les ordures / J'ai pas vu que tu étais caché dedans ». La multiplication des langues brouille les sens. Mais la musique est claire, le clavier obsédant, le riff heavy. Puis l'ambiance drum & bass s'installe sur « Mars5SF ». Grosses guitares toujours, quoiqu'on reste cette fois à la porte du texte. On le regrette, depuis qu'on connaît désormais la portée pratique du missile Lerka-Jo.
« Infractus » (sic) s'impose en titre fort avec un texte qui ferait presque passer la musique au second plan, prouvant que « Je suis Lerka-Jo » n'était pas un one-shot.
« Pornagraphia » dévale ses 02:17 comme une caisse à savon. Unstoppable !
« King Kong » clôture l'album sur un claquement de doigts dans une ambiance hip-hop. Son chant est en Anglais. Son accélération très rock trouve son souffle et conclut l'album efficacement.
Au final, on ne l'attendait pas, cette artiste  au potentiel digne d'une grenade dégoupillée. Et certes pas une grenade à plâtre !
Lerka-Jo joue pour du vrai. Il serait dommageable de ne pas l'écouter. Elle sera à L'International, 5/7 Rue Moret, Paris XIème, le 12/10/2023. 
« Je Suis Lerka-Jo » est disponible sur toutes vos plateformes.

BAD TRIPES, La Vie La Pute (23/01/2023)

BAD TRIPES, La Vie La Pute (23/01/2023)

Le 30/01/2023

BAD TRIPES a toujours cette capacité de vous faire jumper sur le caniveau à l'évocation des destins les plus tragiques.

Un peu plus de cinq ans après l'horrifique « Les Contes de la Tripe », album qui fait date dans le shock-rock français, Bad Tripes revient avec un line-up modifié pour moitié.
Exit Kami (basse), partie fonder Cernunnos, Exit Siger (batterie). Ils laissent la basse à Sir Mac Bass et la batterie à Frame (remplacé désormais par José Jordisson) qui rejoignent sur cet album les fondateurs et principaux songwriters de la formation marseillaise : Seth (guitare) et Hikiko Mori (chant).
En trois albums commis entre 2010 et 2017, Bad Tripes aura imposé à la scène française son empreinte et son exceptionnelle  frontwoman, la bouillonnante, débordante et gouailleuse Hikiko Mori, mi-Arletty, mi-Catherine Ringer, véritable tornade scénique.
Bad tripes trilogie
Son empreinte plutôt que son style, dis-je.
Car le nouvel album, sans abandonner tout à fait le grand cirque qui abritait le précédent opus, marque une rupture sur quelques points.
La cover, d'abord. Car « La Vie La Pute », titre de ce quatrième long format, ne propose pas cette fois de variation autour de sa fantasque et photogénique frontwoman. Seth (guitare), assisté de l'infographiste Thierry Caucino qui s’est occupé du packaging, a travaillé l'artwork (quel talent !) en privilégiant une approche bande-dessinée et en illustrant chaque chanson d'un dessin inséré au livret.
Sur cette pochette, une jeune femme est assise, pour le moins insouciante, rêveuse, musique dans les oreilles, son espérance de vie réduite à quelques secondes. La vie la pute ne fait pas de cadeaux...
Bad tripes cover
Rupture visuelle toujours : Bad Tripes s'était illustré au travers d'une clipographie horrifique composée de véritables mini-métrages : « La Bouchère de Hanovre », « F*** Me Freddy », « Hansel ». Cette fois-ci il a choisi de lancer son album par une approche burlesque avec « La Madrague des Macchabées ».

C'est cette piste sautillante ouvre l'album, dynamique et festive.On retrouvera l'association plage et idées morbides sur un rythme cabaret-jazz avec « Jusqu'à La Lie ».
Rupture sonore enfin pour cette piste qui donne son nom à l'album : « La Vie La Pute ». Bad Tripes s'essaie au hip-hop mâtiné de quelques gros riffs. L'incartade sonne bien et Hikiko Mori est à son aise. Nous sommes curieux de savoir comment cette chanson sera perçue sur scène (Une indiscrétion nous assure que les nouveaux morceaux passent très bien en live).
Bad tripes la vie la pu te
Si nous prenons acte avec ce quatrième album de la naissance d'une nouvelle ère, Bad Tripes n'en renonce pas pour autant à ce qui a forgé son identité.
Ainsi après « Les Griffes de la nuit » (« F*** Me Freddy ») ou « Elephant Man » (« Dame Elephant  »), le cinéma reste-t-il — et peut-être plus que jamais — une référence omniprésente dans l'univers des Marseillais : on le retrouve dans la « Madrague », dont le titre et les paroles pastichent Bardot (« Sur la plage ensanglantée / Coquillages et macchabées »). On l'entend dans « Les Yeux Sans Visage », agressif, puissant et scénique, inspiré du film de Georges Franju, ou dans « Apocalypse Now » — cependant que ce morceau est sans relation avec le succès de Coppola puisqu'il porte un regard désabusé sur la crise sanitaire que nous venons de traverser : « Moi qui rêvais d'incendies, d'un déluge lors d'une éclipse / Comme elle est triste, l'apocalypse ! »
Cinéma encore avec cette station de métro baptisée « Pignon », sur la pochette de l'album, référence avouée au personnage récurent des comédies de Francis Veber (« L'Emmerdeur », « Les Fugitifs », « Le Dîner de Cons »).
Cinéma enfin avec le clin d'oeil à « L'Aventure C'est L'Aventure » qui clôt le tournage de « La Madrague des Macchabées ».
Et si Bad Tripes avait fait là son album le plus cinématographique ?
De même les annales (je ne suis pas sûr quant au choix du terme...) criminelles retrouvent-elles leur place dans l'inspiration d'Hikiko Mori. Après l'affaire du Dahlia Noir et celle de Fritz Haarmann évoquées dans « Les Contes de la Tripe » (« Elizabeth », « La Bouchère de Hanovre »), c'est au tour du tueur de vieilles dames Thierry Paulin d'ensanglanter nos sillons avec « Schlass et Paillettes » : «  Mes rêves de prince et de palaces / Valent bien plus que vos carcasses » estime le lugubre personnage.
Autre constante dans le mélange des guitares bien grosses (« Brûle-Moi Si Tu Peux »), et des samples. Il perpétue le passé des Marseillais.
Constante enfin l'acuité d'Hikiko Mori et sa culture de l'underground qui met en lumière ceux qu'on n'avait pas regardés : ici « Supermasochiste » rend hommage à Bob Flanagan, artiste américain dont l'art était contraint par la maladie ; là  « Afro Girl » évoque la rappeuse féministe Zelda Weinen, de son vrai nom  Maïa Izzo-Foulquier, artiste pluri-disciplinaire et activiste marseillaise , disparue en 2019 à l'âge de vingt-sept ans.
« La Vie La Pute » se termine par « Valya », conte musical tragique d'inspiration russe. La musique festive camoufle la gravité des textes comme un fond de teint sur les bleus  : « Tes yeux couleur glaçon fermés sous l'poids des coups / Je suis le roi des cons ; je ne sens plus ton pouls ».
Capable de se renouveler, Bad Tripes présente avec « La Vie La Pute » un album de transition sans dévier fondamentalement de son axe. Il apporte des  éléments inédits et marque ainsi une distance avec ses prédécesseurs. Il n'en oublie pas pour autant sa caractéristique fondamentale :  cette capacité à vous faire jumper sur le caniveau à l'évocation des destins les plus tragiques. Un véritable tour de force.

PATRICK COUTIN VA BIEN

PATRICK COUTIN VA BIEN

Le 01/12/2022

Patrick Coutin...

Un petit air de Keith Richards avec sa gratte et son bandeau dans les cheveux...
Patrick coutin olivier lebrat
PATRICK COUTIN par Olivier Lebrat
Sacré parcours, le rocker !
Seize ans en 68  — il laissera pas sa part aux chiens.
Première guitare. Pour impressionner sa voisine, confesse-t-il. En 69, faut dire... Année érotique.
La Sorbonne. Philosophie. Les Arts plastiques.
Voyages. Les Balkans, l'Italie, la Hollande, les USA. Puis le Mexique, en douce. Puis le Canada, clandestino, clandestino... Il s'initie à la musique,violon, oud, percussions orientales.
1977, l'année de « Never Mind The Bollocks », de « Rocket To Russia », de « News Of The World », de « Exodus », de « The Clash », de « Rumours ». Il a dû se régaler, Coutin : il est chroniqueur dans Rock & Folk. Entre autres !
1981. On le trouve en tête des hits-parades avec un titre de son premier album : « J'aime Regarder les Filles ».

Kolossal succès de l'année 1981, de quoi péter un cable ! Si vous étiez de ce monde, vous connaissez le titre...
Il est enregistré au Château d'Hérouville. Comme le « Long Live Rock 'n'Roll » de Rainbow ! Dans ce haut-lieu de la musique sont passés Bowie, Pink Floyd ou encore les Bee Gees...
83. Il sature, Coutin. Il songe à abandonner la musique. Il poursuit pourtant comme « Un étranger dans la ville ». Au Château d’Hérouville toujours. Avec des musiciens de Jacques Higelin et avec Dan Ar Braz, un habitué des lieux. On le retrouve, Dan Ar Braz, en cette année 2022 sur « Chateau-Chimères » de Malemort  dont le concept est justement... le château d'Hérouville !
85, « L'Heure Bleue », nouvel album studio. Puis un Live cinq ans plus tard, avec des festivals, Bourges, les Francofolies...
1994, « Aimez vous les uns les autres », propose-t-il..
2000, « Industrial Blues ».
Patrick coutin lainlain45
PATRICK COUTIN par LainLain45
Dans le même temps, Coutin produit et réalise. Les Wampas (« Trop Précieux »), Dick Rivers (« Plein Soleil », « Vivre Comme Ca »).
2010 « Le Bleu », 2011 «  Babylon Panic ».
2020, il frappe fort Coutin ! Un triptyque ambitieux et magnifique ! Un album en français (« Paradis électrique »), un album en anglais (« Welcome in Paradise »), un mix des deux (« Obsolète Paradise »). Les pochettes par trois artistes graphiques qu'il affectionne...

Un livre aussi : « Jim Morrison et les Doors », Hoëbeke / Gallimard, collection Les Indociles.
2022. Coutin prépare déjà son retour discographique. Le nouvel album sortira l'année prochaine. Il nous régale en attendant avec un premier single, « La ballade de Jesus Cat », un clip enregistré « comme un road trip à la Jack Kerouac, entre Austin, Sans Antonio, Corpus Christi et Houston ».

En septembre 2022, il confirme : « A part ça tout va bien » ! Second single.
« Les rivières s’assèchent, la vie s’en va elle ne reviendra pas / Ils fuient la famine, le désert qui avance pour mourir sur nos plages / A part ça tout va bien. »
Le constat rock indigné d'une planète à la santé bousculée et d'une humanité victime et bourreau qui creuse sa propre tombe...

Coutin, heureusement, se porte plutôt bien. Plus présent et plus fort que jamais il confie à propos de son futur album : .
« C’est une longue gestation et ça fait du bien de voir le truc avancer. Cela s’appelle L‘homme Invisible, deux chansons (La ballade de Jésus Cat et À part ça tout va bien) sont sorties sur toutes les bonnes et les moins bonnes plateformes. Et nous jouons déjà quelques titres sur scène. Cela sortira sur Baco Distribution, et nous jouerons l’intégralité de l’album le 21 Mars à La Bellevilloise… »
Etape obligatoire le 03/03/2023, avec la sortie de cet album enregistré aux USA, et la présence sur ses sillons de David Grissom (Guitares) Jarrod Johnson (Batterie) et Eric Holden (Basse).

Les Inestimables d'Ahasverus : AC22, The Trianon Sessions (2018)

Les Inestimables d'Ahasverus : AC22, The Trianon Sessions (2018)

Le 28/09/2022

Ce qui sautera aux oreilles, c'est le goût sûr de  Jean Lou Kalinowski, et sa capacité à nous proposer toujours des chanteurs de haut niveau.

En 2018, Jean Lou Kalinowski, batteur historique de Shakin Street, inaugure avec « The Trianon Sessions » une série d'albums solo + guests sous le nom d'AC22.
Ac22 1
Il explique : « Il y a deux ans, mes voisins faisaient beaucoup de bruit, et j'ai décidé de faire plus de bruit qu'eux. J'ai commencé à écrire des chansons et j'ai mis une annonce sur internet pour trouver des chanteurs. J'ai d'abord rencontré Vitha Sai, un jeune chanteur français. Nous avons enregistré six morceaux ensemble. Il aurait pu être prince, mais il a décidé de faire du rock'n'roll. »
Voila pour Vitha Sai, le prince de cet album... Jean Lou poursuit :
« Plus tard, j'ai rencontré Flora, qui chante sur deux titres. Raoul a aussi chanté sur deux morceaux, mais un seul a été retenu pour cet album. Lou Ben, qui interprète le dernier titre du CD, était le chanteur de Fred Guillemet. »
Pour compléter ce premier tableau Jean Lou fait appel à plusieurs musiciens de la scène métal — multi-instrumentiste, il renoncera ensuite à cette formule pour limiter ses collaborations à des chanteurs  — parmi lesquels le bassiste Fred Guillemet (Trust et Shakin Street notamment) et le guitariste Georges Bodossian (Ocean).
Dix chansons, donc. L'album s'appelle « The Trianon Sessions », en référence au Trianon Studio d'Alfortville où il a été partiellement enregistré.
L'entrée en matière de « The Trianon Sessions » est incisive, et les riffs métalliques de « I'm Back » vous percutent.
Flora Roland est au chant. C'est une grande voix. Très grande. Polyvalente, impressionnante de registre et de technique — jugement confirmé dans le second morceau qu'elle interprète, « My Loss ». Je la comparerais volontiers à une chanteuse comme Annie Lennox. Sa nature soul joue les modératrices face au rock dur développé par la partie instrumentale.
Un succulent jeu de basse  — la basse a pris une très belle place sur cet album  — introduit « I'm Gonna Make It » qui permet de découvrir le registre androgyne de Vitha Sai.

Ce jeune chanteur extraordinaire se fond dans les chansons comme dans son canapé. Il gardera la main sur la plupart des titres de l'album, dans un registre rock/hard-rock. Il irradie ainsi « Men In Suits », « You Could Have Said Goodbye », « I Am The Power », « Light The Fire » ou « All Night Long » de sa voix incontestablement charismatique. Jean Lou Kalinowki ne s'y est pas trompé.

Ce qui sautera aux oreilles, c'est d'ailleurs le goût sûr de  Kalinowski, et sa capacité à nous proposer toujours des chanteurs de haut niveau — les timbres de Raoul Mason-Neuve (le très beau « Blow My Sails ») et de Lou Ben (« Give Me A Sign ») ne sont pas en reste .
Jean Lou sait également s'entourer de musiciens chevronnés. Ils interprètent des compositions accrocheuses, dans une inspiration hard prégnante. On pensera à Led Zeppelin (« I Am The Power » et ses orchestrations ; « Men In Suits » et ses sonorités orientales). La voix de Vitha Sai, pas loin de celle de Robert Plant,  oriente probablement notre perception. On sera aussi tenté de citer Bad Company en particulier, et les 70's en général, mais des 70's reliftées par des orchestrations modernes et fortes.
Malgré la diversité des intervenants et la multiplication des chanteurs sur la galette, « The Trianon Sessions » reste un tout cohérent, un très bon album de rock, bien produit, portant des morceaux construits avec recherche, interprétés de main de maîtres, parsemés de bonnes idées et d'instrumentations judicieuses, un disque qu'on a plaisir à écouter encore et encore, sur lequel les talents éclatent fusée après fusée, comme au feu d'artifice.

Le Lien :


Les Critiques ont dit :

  • C'est la belle surprise Française de ce début d'année, que nous offre là le batteur de Shakin Street en faisant rayonner sur ce disque tout son talent artistique et créatif insoupçonné jusqu'alors, mais distillé en totalité avec une parfaite maitrise.
    RockMeeting

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ULTRAMOULE, Le Retour (2022)

ULTRAMOULE, Le Retour (2022)

Le 14/06/2022

Aussi réjouissant et barré que militant.
Ultramoule artwork
Quoiqu'en dise son nom, « Le Retour » est le premier album d'UltraMoule.
Le trio voyait le jour dans la capitale des Gaules aux environs de 2018. Konda expliquait début 2019 :
« Butch et Ariette sont dans un groupe ensemble, Nikopol, avec trois mecs. Un jour qu’ils se charriaient, Butch a émis l’idée d’un groupe de filles, qui s’appellerait UltraMoule et qui ferait du Punk à chatte. Elle m’a raconté ça la semaine suivante, comme une blague. J’ai tout de suite voulu en être. »
Le groupe enregistrait son acte de naissance avec le clip « Bouge Ton Boule », que voici dans sa version 2022 :

Les Lyonnaises commentaient :

  • Butch : « On l’a fait avec un super copain talentueux, Victor (Monkey Wink Productions), qui nous a aidées à réaliser nos rêves les plus chers : conduire un tracteur, voler dans le ciel, donner un cours d'aérobic... »
  • Ariette : « On a tourné à Bourg-en-Bresse, en plein mois de juillet. Du coup, pour la choré de la fin, on avait beaucoup trop chaud et on transpirait beaucoup, on l’a fait huit fois en tout, alors moi j’ai eu plein de courbatures après. »
  • Konda : « Les scènes sur l’aire de jeux étaient vraiment super drôles à tourner. On était en plein milieu des barres d’immeubles, le son résonnait, il y avait des gens aux fenêtres qui regardaient, un peu perplexes. Et une maman sur un banc juste à côté, morte de rire, avec ses gamins qui ne comprenaient pas ce qu’on foutait sur leurs balançoires… C’était un peu surréaliste comme scène. »

Les filles tissaient leur univers fil à fil, avec originalité et truculence. Engagement aussi : « UltraMoule c'est tout sauf de la vulgarité gratuite, plutôt comme un cours de sciences nat' sur le clit'. » (paroles du titre « Bouge Ton Boule »).
Côté musique, Butch précisait : « On aime bien dire que l'on fait du Gangsista Rap, Punk à chatte ! » tandis qu'UltraMoule se définissait comme « un mélange de Die Antwoord, Stupeflip, Sexy Sushi et Philippe Katerine et à la fois rien de tout ça. »
Après diverses péripéties musicales (dont une prestation gonflée en ouverture d'un concert de rap : C'est l'histoire d'un clip : ULTRAMOULE, "Paye Ta Shnek") le trio annonçait l'album en faisant à nouveau confiance à Victor Cointin pour une vidéo superproduite et décalée qui s'appuyait sur l'univers de Star Wars, transformant au passage - c'était tentant et hautement UltraMoulien - l’Empereur Palpatine en Empereur Palpmapine et le droïde C3-PO en « ces trois pélos ».
UltraMoule expliquait, tandis que, hasard des calendriers, la Russie envahissait l'Ukraine :
« Ce titre c'est un appel à la résistance (oui en ce moment ça résonne vraiment étrangement différemment, on est bien d'accord...). Toujours avec humour et avec joie on veut parler des sujets qui font moins rire. NON le patriarcat n'est pas encore derrière nous (malheureusement), OUI il faut s'allier et se regrouper pour faire CORPS, pour sentir la puissance que l'on porte, pour faire bouger les choses, ne plus avoir peur, se laisser guider par le CŒUR.
C'est une chanson pour se donner du courage, de la joie, faire danser et valser avec férocité les injonctions !
Ce titre est blindé de pop pop pop culture ! On espère que tu kifferas ! »

C'est ce morceau qui a la charge d'ouvrir cet opus sorti chez Daaganda  le 20/05/2022.
UltraMoule signe conjointement les huit pistes d'électro-rock sans guitare nourri au hip-hop qui composent cette galette de vingt-neuf minutes. Capables de belles envolées vocales dans les aigus, les chansons cisèlent les mots à la manière d'un Gainsbourg ou d'une Juliette. Et si UltraMoule dérange, c'est qu'il utilise l' agression textuelle comme arme de distraction massive pour mieux faire passer ses messages. C'est donc un album au design sympa (la pochette est signée Léa Audouze et Barrault Jérémy), à la production soignée, aussi réjouissant et barré que militant, à l'écriture rabelaisienne, précise et percutante, que nous vous recommandons avec la plus grande conviction. 

Line-Up :

  • Butch (Chant lead, Boîte à rythmes)
  • Ariette (Violon Électrique, Chœurs)
  • Konda (Violoncelle Électrique, Chœurs)
    Actualite ultramoule

Tracklist :
1  Hardcore softcœur
2  Bouge ton boule
3  LMPT
4  Mangeons le chat
5  Lèche moi la verge
6  Notre Brochet
7  Guerrilla girls
8  1-2-3 Soleil

Les Liens :

UltraMoule est en concert :

  • Le 17/06/2022 à Hauteville-Sur-Mer
  • Le 02/07/2022 à Landrecies
  • Le 09/07/2022 à Lyon
  • Le 05/08/2022 au SYLAK Open Air
  • Le 25/08/2022 à Aouste-Sur Sye.
  • Le 08/10/2022 à Chalon-Sur-Saône
  • Le 14/12/2022 à Lyon
FIREBUG, No Return (2022)

FIREBUG, No Return (2022)

Le 06/04/2022

Led Zeppelin, Ry Cooder, The Black Crowes, et même Vaya Con Dios sont les noms qui viennent à l'esprit à l'écoute d'un opus particulièrement soigné.

Firebug est un duo basé à Joshua Tree, en Californie.
Firebug mainphoto
Il se compose de Juliette Tworsey (chant, guitare, clavier) et de Jules Shapiro (guitare, basse, orgue).
Il pratique un rock psychédélique d'influence 70's et cite Led Zeppelin en point de repère.
Firebug, qui tourne au moins depuis quinze ans (on n'a pas réussi à dénicher de biographie détaillée mais on trouve des clips dès 2007) a notamment partagé la scène avec Iggy Pop et The Cult.
Le 18/03/2022 Firebug arrive en France via M&O Music avec :

« No Return »
Firebug covernew

« No Return » a été enregistré et mixé par Charlie Stavish (Starcrawler, Imagine Dragons) et masterisé par  Randy Merrill au Sterling Sound Nashville.
Il s'agit d'un sept pistes d'environ trente-quatres minutes.
Le duo est assisté de Joseph Noval à la basse et de Matt Luchich et Charles Wiley à la batterie.
Le single « No Return » dévoilait préalablement à la sortie de l'album la voix puissante de Juliette Tworsey, parée d'un beau vibrato, capable de descendre mais surtout d'aller chercher ses notes très haut dans des titres qui prennent le temps de s'installer.
 
Parmi les instruments, l'orgue conforte un univers rock psychédélique 70's au son moderne. Des guitares rugueuses viennent s'accrocher sur des compositions aux orchestrations originales qui prennent leur temps.
Le blues fait son apparition dans une suite piano/orgue (« Moment Of Joy ») qui permet au chant très personnel de se distinguer encore. L'utilisation du clavier est d'un bel effet (« Down ») et la production donne la résonance qui convient.
Led Zeppelin et Ry Cooder (« St Elmo's Fire »), The Black Crowes, et même Vaya Con Dios pour « Down », ou pour le côté western de « Only The Lucky », sont les noms qui nous sont venus à l'esprit à l'écoute d'un opus particulièrement soigné et à l'identité forte. C'est qu'au-delà des genres, « No Return » est d'abord une suite de très bonnes chansons capables de séduire le public le plus large.
La vocaliste est totalement maîtresse de son art, le songwriting est habité, l'interprétation est impeccable, la production à la hauteur. Tout ceci fait de ce « No Return »  un album de premier plan et de Firebug un groupe original qu'on recommande avec insistance.

Les Critiques :

  • On pense aux grands que sont Led Zeppelin ou Janis Joplin. L'état d'esprit est similaire avec quelques années de différence.
    Pavillon Webzine

La Tracklist :

  1. No Return - 04:58
  2. Trail That's Never End (Celestial Traveler) - 04:51
  3. Moment Of Joy - 03:56
  4. Change - 04:35
  5. Only The Lucky - 03:56
  6. Down - 06:56
  7. St Elmo's Fire - 05:40
    Durée totale : env. 34mn

Le Lien :

SUZIE STAPLETON (Dark Rock), We Are The Plague (2020)

SUZIE STAPLETON (Dark Rock), We Are The Plague (2020)

Le 12/08/2021

Ce premier album révèle une personnalité dark rock et une voix avec lesquelles l'avenir devra compter.

Suzie stapletonDans la série « Il n'est jamais trop tard pour bien faire », voici une séance de rattrapage pour un album inratable sorti le 31/07/2020 : « We Are The Plague », de l'Australienne (installée en Grande Bretagne), Suzie Stapleton.

Il s'agit d'un premier album de onze pistes, d'environ quarante-neuf minutes. Premier album, mais la carrière de Suzie Stapleton est déjà bien amorcée : elle a sorti deux EP (en 2009 et 2012) et partagé la scène avec Mark Lannegan ou Jim Jones And The Rigtheous Mind.

A propos de son artwork, Suzie Stapleton expliquait :
« En raison du premier confinement, le tournage initialement prévu a été annulé et nous avons dû faire preuve de créativité à la maison. J'ai acheté un projecteur bon marché pour que nous puissions faire le clip et faire la cover dans le salon. J'ai organisé les images à l'aide d'une application sur mon téléphone, elles ont ensuite été projetées sur moi. »

Musicalement, nous écoutons religieusement un dark/blues/rock/folk très personnel, intimiste et sombre, dépouillé au possible, monté à coups de guitare, batterie, violoncelle et contrebasse, mais se permettant de se présenter a capella (The River Song) pour un effet saisissant. Suzie Stapleton peut néanmoins se faire, comme pour la chanson-titre, énergique, et développer une grande puissance (In The Darkness).

Les thématiques abordées par les lyrics sont au diapason de l'univers musical : changement climatique, effondrement de la société... Si elle parle de fleurs, ce sera sûrement pour votre enterrement. Il faudra s'y habituer, parce qu'on va la revoir, Suzie Stapleton ! Son premier album révèle une personnalité avec laquelle l'avenir devra compter.

Le timbre est grave, légèrement rauque et totalement remarquable. On pense à Patti Smith, voire à Spike, le chanteur de The Quireboys (You Were There). Cette voix, servie par ce songwriting de haute-couture, fait de cet album une plante carnivore captivante et vénéneuse qui vous retiendra dès lors que vous aurez posé vos pattes sur la première piste.

« We Are The Plague » est un voyage fascinant et révèle une chanteuse remarquable. Faites comme moi, ne le ratez plus !

Les Liens :