SCARRED fait peau neuve

Le 14/12/2020

« Quand on a décidé de changer de chanteur, le but n’était pas de refaire le même album avec une voix différente. »

Avec dix-sept ans d'existence, SCARRED revient avec un nouveau line-up, un nouveau clip, un kick-ass album  (à paraître le 22/01/2021) et une réorientation  pour élargir son champ d'action.
Ahasverus crevait de curiosité.
Les Luxembourgeois ont bien voulu répondre à ses questions.

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Scarred par Lugdivine Unfer


Bonjour Scarred. Votre groupe existe depuis 2003. Votre formation a été bousculée depuis "Gaia/medea", votre dernier opus. Quel est votre line-up actuel et pourquoi ces bouleversements ?
Laurent (batterie) :
Bonjour ! Actuellement le groupe se compose de Yann au chant, Diogo et Vincent à la guitare, Bertand à la basse et Laurent à la batterie. On a effectivement changé deux membres depuis notre dernier album dans le but de se réinventer musicalement. Après la sortie de Gaia / Medea, Diogo est parti en Norvège jouer pour Satyricon pendant deux ans et a été remplacé par Vincent, qui est un musicien et un mec génial comme on en rencontre rarement (allez écouter son groupe Fractal Universe, vous allez vite comprendre !). Quand Diogo est revenu il était hors de question de s’en séparer.
Pour ce qui est du chant, on a décidé qu’il était temps d’explorer de nouvelles sonorités plutôt que de rester dans notre zone de confort et refaire un album similaire aux deux premiers. On connaissait Yann depuis plusieurs années et on savait de quoi il était capable. Ça n’a pas été une décision facile de se séparer de notre ancien chanteur mais comme vous pourrez l’entendre dans notre nouvel album, les possibilités avec ce nouveau line-up sont quasiment infinies, et notre musique va pouvoir continuer à évoluer au fil du temps.


Attaquons directement dans le vif. Après "New Filth Order " en 2009 et Gaia/Medea en 2013, vous revenez en 2021 avec l'album "Scarred". Donner le nom du groupe à ce troisième album est une manière de nous signifier qu'il est le plus intime des trois ?
Laurent :
Non seulement c’est l’album le plus intime (et de loin), mais il raconte aussi une période très sombre de nos vies. Il s’inspire directement des évènements dans et autour du groupe depuis la sortie du dernier album, qui pour certains d’entre nous ont laissé beaucoup de marques. Une fois qu’on s’est rendus compte qu’on était en train de raconter notre propre histoire et nos propres blessures, le nommer Scarred est vite devenu une évidence.


"On a passé énormément de temps en préproduction dans notre home studio à explorer différents univers sonores et à essayer de créer un album qui soit une œuvre cohérente et pas juste une collection de chansons."


En 2016, Diogo expliquait dans une interview à https://www.artnroll.net : "On fait du métal assez violent mais on ne veut pas tomber dans le cliché des pochettes têtes de mort avec des explosions." A qui avez-vous confié l'artwork  cette fois-ci et quelle était l'idée que vous souhaitiez projeter ?
Diogo (guitare) : L’artwork a été réalisé par Drazen Medakovic, un ami d’enfance et artiste bourré de talent qui s’était déjà chargé du design de l’album Gaia/Medea (www.drazenillus.com). C’est toujours un plaisir de travailler avec lui, parce qu’il comprend notre musique et ce qu’on essaye de véhiculer dans nos textes. On lui a tout simplement donné la maquette et les paroles et expliqué les évènements qui ont entouré l’écriture de l’album en lui laissant carte blanche. Il a réussi à résumer à la fois l’univers sonore, le contenu lyrique et même le processus de création de l’album en une seule image. On n’aurait pas pu rêver mieux pour la pochette !
L’idée véhiculée est celle de la transformation. Le personnage représenté purge sa dépression et la transforme en arcs-en-ciel au cours d’un rituel shamanique. C’est ce qu’on a essayé de faire avec cet album, utiliser le négatif pour en faire quelque chose de beau et amorcer un changement à la fois dans nos vies et dans notre musique. C’est presque de la psychothérapie.

Artwork

Contexte, environnement, situation géographique, envie de faire évoluer sa musique... qu'est-ce qui a décidé de  l'orientation de l'écriture de l'album "Scarred"?
Bertrand (basse) :
En fait tout ce que tu viens de citer. Nos vies ont beaucoup changé depuis la sortie du dernier album, on a tous vécu pleins d’expériences différentes, nos influences musicales sont beaucoup plus variées… bref, on a tous évolué en tant qu’êtres humains et musiciens, et vu qu’on écrit avec nos tripes, notre musique a évolué avec nous. Par ailleurs, l’éloignement de Diogo, notre compositeur principal, et l’intégration de Yann comme nouveau chanteur nous a aussi obligés à fonctionner d’une manière complètement différente pour l’écriture des chansons. On a passé énormément de temps en préproduction dans notre home studio à explorer différents univers sonores et à essayer de créer un album qui soit une œuvre cohérente et pas juste une collection de chansons.

J'ai cru voir des références à la Grèce ou à la Rome Antique dans cet album...
Laurent :
C’était certainement le cas sur Gaia-Medea, mais sur cet album on s’est plutôt inspirés du folklore sud-américain. Ayant longtemps baigné dans le latin et le grec ancien, il y a toutefois moyen que j’y fasse allusion de manière inconsciente de temps en temps. J’essaye généralement d’écrire les textes de sorte à raconter ce que j’ai envie de raconter tout en laissant de la place à différentes interprétations, donc je suis toujours content quand quelqu’un y voit quelque chose que je n’ai pas forcément eu l’intention d’exprimer. Je serais curieux de savoir à quelles parties exactement tu fais référence (peut-être la chanson Dance of the Giants?).
(NDLR en réponse à Laurent : n'étant pas anglophone ma méprise tient uniquement aux titres A.H.I.A. et Petrichor, parce que sauf erreur Ahia  était une province grècque et "ichor", dans la mythologie, était le sang des dieux)

"Mirage" est votre premier single. Ca a dû être cornélien de choisir un titre plutôt qu'un autre avec un album aussi ouvert musicalement...
Yann (Chant) :
C’est clair ! Quasiment toutes les chansons de l’album ont à un moment donné été en lice pour être le premier single. On a fini par choisir Mirage parce que c’est une chanson à la fois puissante et mélodique qui fait bien le pont entre les albums précédents et celui-ci tout en annonçant la couleur de ce qui va suivre. De plus, le clip est à mon avis très réussi, ce qui a facilité le choix. J’aimerais profiter de l’occasion pour remercier encore une fois notre ami Kim Conrardy de U-Matic Productions pour le super travail qu’il a fourni.



Même s'il  en intègre toujours des éléments à sa musique, SCARRED, le groupe,  ne peut plus être défini comme un groupe de death. Il va bien au-delà avec des titres comme "Merry Fo Round" ou "In Silent Darkness"...
Diogo :
Je prends ça pour un compliment ! Il est vrai que certains titres du nouvel album risquent de surprendre les fans de la première heure, mais on l’assume complètement. Quand on a décidé de changer de chanteur, le but n’était pas de refaire le même album avec une voix différente mais bien d’utiliser toute la palette de possibilités que nous offre Yann et de ne pas s’imposer de limites dans notre écriture. L’album va du death au rock en passant par le psychédélique, le symphonique, le clean et même l’instrumental, ce qui est une première pour nous. Chaque chanson correspond à un chapitre d’une histoire qui est tout sauf linéaire. Du coup chaque titre a sa propre ambiance et des sonorités tout à fait différentes du titre précédent.

La construction de "A. H. A. I. A.", et sa suite "Lua", sont surprenantes. Ca commence comme un morceau de death mais ça finit presque en world music... Peut-on avoir une petite explication de texte ?
Laurent :
Dans l’histoire que raconte l’album, A.H.A.I.A., c’est le fond du gouffre. Niveau texte c’est probablement la chanson la plus sombre qu’on ait jamais écrite. Une fois qu’on a touché le fond à la fin de la partie death s’amorce le processus de guérison et de transformation par le rituel shamanique qui suit avec une partie d’abord psychédélique puis un véritable rouleau compresseur de graves et de double pédale, symbolisant le caractère à la fois hallucinatoire et intensif de ce genre d’expérience. Une fois le rituel terminé, on se retrouve seul pour réfléchir à ce qu’on vient de vivre en contemplant la lune (LUA) au milieu de la forêt. On n’est pas encore complètement guéri, mais la musique commence à changer.


"Avec Scarred on a construit notre réseau une date à la fois, en traitant chaque concert comme un casting pour le concert suivant, peu importe qu’il y ait mille ou cinquante personnes dans la salle."



Vous concluez "Scarred" par "Petrichor", un titre au chant clair. Donne-t-il le signal de la fin d'une ère et du début d'une autre ?
Yann :
  Pas forcément. C’est plutôt la fin en apothéose du voyage qu’on vient de faire tout au long de l’album, mais cela ne signifie pas que l’avenir du groupe est uniquement fait de chant clair et de sonorités rock (il y a déjà du lourd et sombre de côté pour le prochain album !). On a surtout eu envie de finir l’histoire sur une note positive tout en explorant encore un territoire jusque-là inconnu pour le groupe. Il y aura certainement d’autres titres plutôt clean sur nos prochains albums mais comme dit précédemment, le but est surtout de ne s’imposer aucune limite dans l’écriture et d’aller où la musique nous emmène.

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Scarred par Lugdivine Unfer

Vous êtes un groupe luxembourgeois. Le fait de vous situer à la jonction de l'Allemagne, de la Belgique et de la France, est-t-il un avantage pour distribuer sa musique ?
Bertrand :
Non, je crois qu’à l’ère du numérique ça n’a plus d’importance pour la distribution. Pour le live par contre c’est plutôt un désavantage. Avant d’atteindre un certain niveau les groupes luxembourgeois galèrent à s’exporter parce qu’ils n’arrivent pas à couvrir leurs frais de déplacement ou parce que les associations et salles de concert privilégient souvent des groupes locaux. Avec Scarred on a construit notre réseau une date à la fois, en traitant chaque concert comme un casting pour le concert suivant, peu importe qu’il y ait mille ou cinquante personnes dans la salle.

Merci Scarred de m'avoir accordé cette interview.
Yann :
Merci à toi, c’était intéressant comme interview, on voit que tu as vraiment écouté l’album. Merci aussi à tes lecteurs et à bientôt près de chez vous j’espère !

 

 

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