Les dossiers de Pépé St@kaTTo : ITOIZ, "Espaloian" (1985)

Le 07/01/2021

Groupe        :    Itoiz
Album          :    Espaloian
Genre          :    Pop-Rock
Influences   :   Doors / Fleetwood Mac / Police / Clash
Origine        :    Mutriku (Euskal Herri / Pays Basque, espagnol et français)
Sortie          :    15 mai 1985 (Elkarlanean) - remastérisé le 15 juin 2009 (ELKAR)

Par Pépé St@kaTTo

 Itoiz espaloian
Line-up pour cet album :

  • Juan-Carlos Perez (guitare, chant)
  • Jose «Foisis » Garate (basse, choeurs)
  • Jimmi Arrabit (Batterie)
  • Jean-Marie Ecay (guitare)

Album vendu à 50.000 exemplaires.


En cette année 1985 Itoiz  publie «Espaloian»,  son cinquième album. Album dans lequel le groupe laisse de côté le rock progressif et le folk traditionnel de leurs premières œuvres pour s’embarquer définitivement dans un pop-rock plus commercial, ce qui en fait un album plus accessible.  

Bien qu'il s'agisse d'un album plus commercial que les précédents, c'est un opus de neuf titres d'une qualité incontestable. D'abord parce que les paroles des chansons d'Itoiz continuent d'être extrêmement réalistes tant elles collent à l’époque des 80's, avec un mélange d’intimité et d’émotions partagées, mais également parce que musicalement cet album se veut festif. C'est assurément l'album le plus pop-rock de leur discographie, plus mélodique, et beaucoup plus électrique qu’acoustico-folk grâce à l’apport guitaristique de Jean-Marie Ecay et ses influences Fleetwood Mac, Police ou Clash (d’où l’utilisation d’arpèges en son clair chorus et reverbe), mais également avec un foisonnement de multiples parties de claviers et de saxophones.

Itoiz 5C'est aussi l'un de albums d’Itoiz les plus variés, avec des thèmes dansants, «Egun motela», «Berandu da», le très calme «Espaloian» ou le morceau reggae «Tximeleta reggae», des mélodies comme «Hegal egiten» ou «Abar Irratian»,  vont vous trotter dans la tête un bon moment (pas besoin de connaitre le basque !).

Le son et les chansons de «Espaloian» reflètent ainsi l'état d'esprit d'une génération de jeunes gens qui vivent dans les années quatre-vingt, période post-franquiste,  écrasés par le chômage et la pauvreté et qui s’ennuient. Ce désir de s'évader de la vie qu'ils mènent, et d’indépendance, a influencé presque tous les textes de l’album. Ce climat se retrouve dès le premier morceau «Egun motela» qui ouvre l'album et qui, comme le suivant «Hegal egiten» sont devenus d'authentiques hymnes dans tout le pays basque.

Il faut également souligner l’excellent travail en studio d'enregistrement du technicien Antonio Morales, qui a su donner à l’album ce son pop-rock si particulier, propre et envoutant, et mettant bien en avant le rôle de la basse ; c’est le cas du troisième morceau «Berandu da» qui nous raconte la recherche infructueuse de l'amour idéalisé.

Dans le titre qui donne son nom à l’album «Espaloian», la voix de Juan Carlos Perez est triste et mélancolique, mais en même temps véhicule tout son lot d’émotions, une chanson qui souligne les jours gris et pluvieux, les nuits sombres et pleines de tension, qui s’enchaînent et se suivent inlassablement, un petit bijou, et ma préférée de l’album.

On retrouve également le son et l’influence de Police dans les parties de basse de Jose Garate "Foisis", dans «Taxi horiak», ou «Tximeleta reggae», qui nous dépeignent l’indifférence que leur ville produit, le tableau d’une mer sombre et abyssale. A noter dans ce dernier, le mélange particulier de rythmes reggae et bossa nova, subtile alchimie.

La chanson «Telefonoan» décrit en détail la nuit dans la ville, sombre et dangereuse, «Abar Irratian» rend lui hommage à la radio nocturne qui vous accompagne tout au long de la nuit, c’est peut-être la seule chanson joyeuse et bondissante de tout l'album. La ligne de basse est ici aussi fabuleuse.

L’album se termine avec «Clash eta Pistols» qui n’a de punk que le nom. Au menu, son clair guitare et «accordéon» et toujours cette basse omniprésente qui telle une locomotive «drive» ici tout le morceau. Une inspiration très Stranglers de la belle époque.

Si vous aimez la pop-rock du début des années quatre-vingt, je vous invite à découvrir le son d'Itoiz et ce sublime «Espaloian».  Fermez les yeux et laissez-vous transporter en 1985 dans cette petite ville de bord de mer du pays basque, par une nuit froide, pluvieuse et désagréable, dans une rue vide et sombre. Laissez-vous guider par la musique que vous entendez, approchez… plus près ! Dans le centre-ville, sur cette vieille place faiblement éclairée joue «le plus grand» des groupes de rock basque, et il s’appelle Itoiz …

Pour écouter l’album entier sur Youtube :
https://www.youtube.com/watch?v=oAgKIkCy1V4&feature=emb_title

Pour découvrir la culture basque, musicale et littéraire :
https://www.elkar.eus/fr