Les N'importe-Quoi d'Ahasverus : METALLICA, Kill' Em All (1983)

Le 01/08/2021

« Quand j'étais jeune, avec mon pote Serge, on jouait dans un air-groupe. »

Kill em allSerge tenait la air-basse, et moi le air-micro et la air-guitare. On connaissait un peu de air-succès ! On se produisait régulièrement dans sa chambre, devant un air-public.

C'était parfait chez Serge : d'abord parce qu'il avait une chambre pour lui tout seul ; ensuite parce qu'il détenait une super chaîne stéréo dont la platine pouvait aller aussi bien en avant qu'en arrière, comme une vraie platine de DJ !

Mon pote Serge, il avait le sens de la musique. Ces choses-là ne se savent qu'à posteriori. Dès 1978 il me faisait écouter Saga. En 1981 il avait « New Life », le second quarante-cinq tours d'un groupe inconnu en France : Depeche Mode. Et puis Devo,  Twisted Sister, et puis j'en oublie ! Musicalement, Serge était toujours au début du chemin. Comment faisait-il ? Je ne lui ai jamais posé la question. Parce qu'à l'époque, rien ne laissait supposer que Depeche Mode, Twisted Sister, Saga ou Devo s'inscriraient dans l'histoire du rock

Depeche mode« New Life » (1981) est le premier gros succès du groupe DEPECHE MODE.

Avec notre air-groupe qui n'avait pas encore de air-nom Serge et moi on faisait surtout des air-covers. On renouvelait notre air-setlist régulièrement.
Financièrement, Serge disposait de l'appui de ses parents. Ils avaient divorcé, et pour faire chier l'autre, chacun essayait d'attirer le rejeton dans son camp en lui filant un max de biftons, que Serge investissait dans la musique. J'en profite d'ailleurs pour remercier publiquement aujourd'hui les parents de Serge : leur rivalité a construit mon éducation musicale.

Un jour de 1983, Serge se pointe avec deux nouveaux skeuds. Le premier s'avère totalement novateur. Le chanteur a une voix stupéfiante. La musique est hyper speed. La provoc' est ultime. Le 33 tours s'ouvre sur « Heidi, heido, heida ». Ca ne dira rien aux jeunes générations, « Heidi, heido, heida », mais pour ma mère qui a connu les bombardements de Nantes, le message est clair : « Ein Heller und ein Batze » (c'est le titre de cette chanson) est un chant nazi. Alors tu peux le justifier comme tu veux, mais « Heidi, heido, heida » suivi de la griffure caractéristique d'un disque rayé et du cri d'un porc qu'on égorge, c'est évidemment une énörme provocation que des mecs de la génération d'Udo Dirkschneider ne pouvaient ignorer ! En quelques secondes, « Fast As A Shark » vient de nous botter le cul jusqu'à l'os et les cicatrices sont là pour la vie ! Mais on sait bien que tout ça c'est le grand cirque du rock'n roll : Accept n'est pas plus nazi que Black Sab', Kiss ou Dio ne croyaient en Satan...

AcceptSorti en 1982, l'album « Fast As A Shark » s'ouvrait sur « Ein Heller und ein Batze », une chanson populaire allemande qui était l'un des chants de marche des troupes allemandes durant la seconde guerre mondiale. Elle valut à Accept quelques controverses, mais aussi de se faire remarquer...

Second disque. Un sticker sur la pochette nous prévient : « Plus vite que moi tu meurs ! ». En rouge et noir (trois ans avant Jeanne Mas, c'est avant-gardiste !) un marteau, du sang. Au verso, des têtes d'ados boutonneux, catégorie têtes à claques, surtout celui de droite.

Metallica versoLe premier titre est brouillon inaudible. Désagréable. « The Four Horsemen », le second, est mieux écrit. Les huit autres pistes ne nous intéressent pas. C'est trop crade, trop fouillis. Ecoutez « Anesthesia - Pulling Teeth » et vous comprendrez ce qu'on a pu ressentir alors. On se repasse « The Four Horsemen » plusieurs fois quand même pour sa structure rock plus digeste... Accept a clairement nos faveurs.

En 1983 Metallica jouait du « Speed Metal ». Il est l'avant-garde du Thrash dont il écrit les règles, un genre qui allait révolutionner le Hard Rock.

Il n'y a eu à mon sens que deux coups de pieds dans la fourmilière Metal : « Black Sabbath » qui a donné naissance au courant doom/black, et « Kill Em All » qui a mordernisé un genre qui se faisait rattraper par les grosses radios.

« Kill Em All » ramassera un disque d'or plusieurs années après sa sortie. Quand mon pote Serge, moi et tous les autres aurons compris le génie de cet album et réussi à refaire notre retard. Il est depuis incontournable.

On ne mesure plus forcément l'impact de Metallica de nos jours. Mais qu'on les aime ou pas, sans eux, ma tête à couper, le Metal d'aujourd'hui ne serait pas celui-là.

 

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